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  • : Géopolis
  • : Géopolis est consacré à la géopolitique et à la géostratégie : comprendre la politique internationale et en prévoir les évolutions, les conflits présents et à venir, tel est le propos, rien moins !
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  • Mélusine

Géopolis

Par ces temps troublés, l'actualité géopolitique inquiète et déconcerte. Les clefs nous manquent souvent pour en appréhender les facteurs d'évolution décisifs. Et en cette matière, les médias communs informent à peu près aussi mal qu'ils sont mal informés. On nous parle beaucoup de "mondialisation", mais la compréhension des désordres mondiaux n'en paraît pas tellement meilleure et les désordres eux-mêmes persistent, redoublent même... Bien sûr, Géopolis n'a pas la prétention de tout savoir et de tout expliquer. Nous tenterons simplement ici avec ceux qui voudront bien nous rejoindre de contribuer à la réflexion, d'éclairer certaines questions d'actualité en apportant des informations passées inaperçues ou des témoignages de première main, et aussi de prendre un peu de distance pour ne pas trop nous laisser impressionner par l'impact immédiat des événements. A qui s'adresse Géopolis ? A nous tous, simples citoyens, parce qu'en nos pays réputés démocratiques, nous sommes à l'origine de choix cruciaux : par le vote, c'est nous qui portons au pouvoir des hommes dont les décisions (ou les indécisions) feront le monde de demain, les guerres, la vie et la mort des pays et des peuples... C'est bien sérieux tout ça ! - Oui, le sujet est sérieux, mais les manières de l'aborder peuvent ne pas l'être toujours. Il sera donc aussi question de traités d'art militaire, de la formation des chefs d'Etat, de romans d'espionnage ou de cinéma...

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26 décembre 2006 2 26 /12 /décembre /2006 00:45
"Noël, Noël !"
C'était autrefois un cri de joie saluant les événements heureux.

En ce lendemain de Noël, du latin natalis, jour de la naissance de l'Enfant Jésus, une pensée pour son lieu : Bethléem. La ville ne se remet pas du conflit israélo-palestinien persistant et les pèlerins semblent avoir déserté les lieux. Comme le dit le Patriarche latin de Jérusalem, Mgr Michel Sabbah : "Nos dirigeants, jusqu'à présent, n'ont fait que la guerre, ils n'ont pas fait la paix".

Eglise de la Nativité, 24 décembre 2006
Photo trouvée sur un site d'information canadien :

Et celle-ci, prise en avril par des pèlerins français :

Grotte de la Nativité à Bethléem
www.leverbedevie.net/multimedia/photos%5Fisrael/

Peut-être se souvient-on encore du siège par l'armée israélienne de la basilique de la Nativité de Bethléem où des activistes palestiniens s'étaient "réfugiés' ? La basilique assiégée près de 40 jours, entre le 1er avril et le 11 mai 2002, cela tenait du sacrilège. Il semble pourtant que les choses ne se soient pas tout à fait passées comme Mgr Sabbah et les journalistes le colportaient alors, si l'on en croit le témoignage de Jean-Marie Allafort : http://moise.sefarad.org/belsef.php/id/938/

Réfugiés ou plutôt assaillants ? Malheureux privés d'eau ou soudards musulmans faisant ripaille jusque sur les autels ? Il semble en tous cas que les gardiens des lieux que sont les franciscains de la Custodie de Terre Sainte et les patriarcats grec orthodoxe et arménien n'aient pas été ravis de leur intrusion : "...la situation problématique créée dans et autour de la Basilique est le résultat de l'irruption d'hommes armés qui se sont barricadés sur place. Les fausses informations ci-dessus [des organes de presse avaient prétendu que le patriarche latin de Jérusalem leur aurait ouvert le sanctuaire] aboutiraient non seulement à attribuer aux religieux des responsabilités qui ne sont pas les leurs, mais aussi des choix qu'ils n'ont jamais fait."

On devine en tous cas toutes les difficultés et l'ambiguité de la situation des Chrétiens d'Orient obligés de composer avec ceux qui souvent les persécutent...

Du coup, mon petit poème du printemps 2002 ne vaut plus rien !
  • Prière pour Bethléem.
  • Il pleut sur Bethléem, il pleut sur les flaques de sang, sur les masques blancs yeux ouverts, sur les ombres et sur les morts, et puis sur ceux qui restent, visages hâves, émaciés, de fond de caves et de veilles en armes, lèvres assoiffées. Il pleut.
Pas besoin de pluie, ils avaient des citernes !

Statue de la Vierge sur le toit de la maternité
de la Sainte Famille à Bethléem
Les impacts de balles laissent supposer qu'elle a servi de cible...
(source : Ordre de Malte)
 
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16 décembre 2006 6 16 /12 /décembre /2006 22:18
Pourquoi donc s'étendre sur la mort d'un supporter du PSG sur un site avant tout consacré à la géopolitique ? Certes, au départ, ce n'est qu'un triste fait divers : un déséquilibré tire sur un supporter de football et, par ricochet, en tue un autre. Mais l'intervention des plus hautes autorités de l'Etat donne à cette affaire un tout autre sens.

Rappel :
Justice pour Julien : http://geopolis.over-blog.net/article-4752658.html
Vous avez dit racisme ? : http://geopolis.over-blog.net/article-4757622.html
Votre héros est un malade mental : http://geopolis.over-blog.net/article-4771175.html

Manipulation ?

Je ne veux pas jouer les petits Zola et faire mon "J'accuse", mais tout de même : trop de questions restent sans réponse et l'absence de réponse souvent en dit long... Alors allons-y :

1. La débauche ridicule d'encadrement policier qui entoure désormais chaque petit match du PSG ne parvient pas à faire oublier l'absence des forces de l'ordre en nombre adéquat lors du match à risques qu'était la rencontre PSG - Hapoël. Pourquoi le préfet de police, Pierre Mutz, a-t-il refusé de prendre les mesures qui s'imposent d'ordinaire lors de ce genre de rencontre ? Et le préfet ne faisant qu'exécuter les ordres, pourquoi le Ministère de l'Intérieur a-t-il sciemment réduit la sécurité au lieu de l'augmenter ?

2. Pourquoi les "hooligans" du Hapoël n'ont-ils pas été soumis aux mêmes fouilles que ceux du PSG, ce qui est une des causes du mécontentement de ces derniers ? Pourquoi n'a-t-on pas saisi leurs fumigènes ? Qui avait donc intérêt à jeter de l'huile sur le feu ?

3. Pourquoi, après la fin du match, a-t-on retenu dans le stade les "hooligans" du Hapoël, alors qu'on faisait sortir les simples spectateurs des autres tribunes, familles de juifs français comprises, au risque de les exposer aux violences des "hooligans" du PSG ? Que voulait-on qu'il arrive exactement ?

Je rappelle ici que le principe de ce prétendu hooliganisme, chez les supporters français en tous cas, est de se retrouver après les matchs pour se fritter avec les supporters de l'équipe adverse qui partagent le même état d'esprit. On remarquera d'ailleurs que malgré le mouvement de colère de ces supporters du PSG qu'on dit si violents, il ne semble pas y avoir eu de blessés à dénombrer parmi les spectateurs, n'était l'irruption du nommé Granomort.

4. Pourquoi la presse unanime a-t-elle mis en avant "le scandale des insultes racistes" comme si rien de plus grave ne s'était passé ? Ceci donne la désagréable impression que toute cette campagne médiatique était préparée d'avance et les incidents attendus, voire souhaités, quitte à prendre des familles juives en otages de cette politique tortueuse en refusant d'assurer leur sécurité. Ce qui, en revanche, n'était pas prévu, c'est qu'un policier fou se précipite contre des supporters du PSG, tire et tue. Pourquoi sinon aurait-on vilipendé la victime comme on l'a fait si ce n'est pour justifier un meurtre qui n'allait pas dans le sens voulu ? Et je pèse mes mots.

5. Pourquoi les blessés n'ont-ils pas été secourus ? La police a préféré protéger les vitrines d'un MacDo plutôt que de porter assistance à un mourant à quelques mètres de là... Je sais que vous vous inquiétez tous du sort des vitres du MacDo : elles ont été remplacées dans les jours qui ont suivi, merci pour elles ! Et pourquoi la police a-t-elle fait usage de gaz lacrymogène pour chasser les jeunes gens et jeunes filles qui tentaient de sauver Julien ? Et les pompiers à proximité qui mettent 15 mn pour faire 300 mètres ? Fallait-il donc le laisser mourir ? La non-assistance à personne en danger, vous connaissez ? Les témoignages sont accablants.
  • Drame du PSG : La rapidité des secours en question par Philippe Broussard
  • vendredi 24 novembre 2006, mis à jour à 19:59
  • LEXPRESS.fr a recueilli le témoignage de deux jeunes gens présents dans l’attente des pompiers auprès de Julien Quemener, un jeune supporter du PSG victime jeudi soir du tir d'un policier après la défaite de son équipe au parc des Princes.
  • Combien de temps les pompiers ont-ils mis pour venir secourir Julien Quemener, le jeune supporter parisien mort d’une balle dans le coeur jeudi soir à la Porte de Saint-Cloud ? C’est désormais l’une des questions posées dans cette enquête. Selon les calculs de LEXPRESS.fr, ce délai s’élève à une quinzaine minutes.
  • Nous disposons en effet de deux témoignages inédits de jeunes supporters parisiens, Matthieu (26 ans) et Vincent (24 ans), arrivés très vite au chevet de la victime, qui était alors allongée devant l’entrée d’un entrepôt de la RATP, à une trentaine de mètres du Mac Donald’s où s’était réfugié le policier. Nous avons nous-mêmes constaté la présence de Matthieu et Vincent, jeudi soir, auprès du blessé, et leurs efforts pour le maintenir en vie.
  • C’est Matthieu qui, dès 22 h 54 - l’heure d’appel figure dans la mémoire de son téléphone portable - passe un appel au "112", le numéro d’urgence des pompiers. Selon lui, la personne de permanence ne paraissait pas encore informée de ce qui se passait du côté de la Porte de Saint-Cloud. La conversation va durer 3 minutes et 20 secondes. "Le pompier que j’ai eu au téléphone m’a d’abord demandé des précisions sur les circonstances du drame, puis il m’a dit qu’ils allaient envoyer une équipe", confie Matthieu.
  • Celui-ci raconte avoir ensuite passé son portable à une "jeune fille blonde", présente sur les lieux, qui paraissait avoir des notions de secourisme. "Le pompier lui donnait des conseils à distance, raconte-t-il. Je ne la connaissais pas, mais elle a fait tout son possible. Elle était agenouillée et appuyait sur le thorax de la victime, à l’endroit où la balle avait pénétré. Dans le même temps, un homme que je ne connaissais pas non plus, âgé d’environ 35 ans, lui donnait des petites claques pour le maintenir éveillé. Nous ne voulions pas qu’il ferme les yeux, mais nous sentions qu’il était en train de partir".
  • Au bout de 3 minutes et 20 secondes, la ligne téléphonique est brusquement interrompue. A 22 h 57, puis à 22 h59, Matthieu tente, vainement, de rappeler le "112". Il tombe sur un message d’accueil. "C’était interminable, j’étais complètement perdu", se souvient Vincent. "Nous ne savions pas quoi faire, confirme Matthieu. Des jeunes sont allés chercher des petites bouteilles et nous avons essayé de verser un peu d’eau dans la bouche du blessé pour éviter qu’il se déshydrate."
  • Afin de préparer l’arrivée des pompiers, les CRS commencent à disperser les personnes présentes auprès de la victime, dont Matthieu et Vincent. Ils utilisent notamment des gaz lacrymogènes, ce qui ajoute à la confusion.
  • Les premiers secours arrivent peu avant 23h10. Au total, une quinzaine de minutes se sont écoulées depuis l’appel de Matthieu. S’agit-il ou non d’un délai normal en pareil cas? Les pompiers de Paris, sollicités par LEXPRESS.fr, invoquent le secret de l’instruction pour s’abstenir de tout commentaire.
  • Matthieu, lui, ne parvient pas à oublier ces minutes d’attente et se plaint du traitement médiatique de l’affaire: "Personne ne parle de ce qui s’est passé pendant que la jeune fille essayait de le maintenir en vie, qu’un autre supporter et moi-même lui mettions de l’eau sur le visage, de ces supporters qui formaient un 'cordon de sécurité' pour lui laisser de l’air, ni de ceux partis chercher des bouteilles d’eau ou voir les agents de police, qui n’ont d’ailleurs pas bougé. Il y a eu un mouvement de solidarité autour de ce jeune homme! Alors, tout le monde a oublié le racisme et ce qui allait autour ce soir-là. Pour nous qui étions avec lui, ce qui se passait dans le McDo était à cent lieux. On entendait plus les chants, les cris, on voulait juste faire de notre mieux. Et que les pompiers arrivent."
Mais peut-être la préfecture ne savait-elle pas encore que le supporter à terre n'était pas un de ceux de l'Hapoël Tel Aviv ?

Contre la violence ?

Il faut replacer cette affaire dans son contexte. Nous sommes à quatre mois des élections présidentielles. Les crimes et délits sont en augmentation constante en France tant en nombre qu'en gravité, malgré les consignes données à la police pour ne pas enregistrer certaines plaintes (au mieux une main-courante - j'en sais quelquechose !) et les statistiques faussées, comme récemment dans le Nord. Tous les jours, des bus et des voitures particulières brûlent. Sans parler du sort des femmes dans les banlieues, du trafic de drogue et d'armes, etc. Alors quand on vient me parler de la violence des hooligans...

Au vu des questions sans réponse, on peut donc se demander si l'affaire médiatique n'avait pas été montée de toutes pièces pour détourner l'attention des insuffisances criantes de la politique sociale et de sécurité des gouvernants. Détourner l'attention sur les méchants supporters du PSG, derniers bouc-émissaires en date, alors que quelques mois plus tôt nous étions tous sommés de "supporter" les Bleus ! On a oublié un peu vite que le dernier fils du Ministre de l'Intéreur s'affichait alors parmi les supporters déclarés du PSG... - un futur hooligan ? - mais en tribune présidentielle bien sûr.

Il y a quelquechose de malsain dans les interdictions de stade qui frappent maintenant les supporters à tours de bras. Des jeunes gens se voient exclus d'un loisir somme toute assez anodin sans avoir commis aucun crime. Qu'attend-on pour interdire de bus les incendiaires ? Pour interdire de banlieue les revendeurs de drogue ? Pour interdire du territoire national les repris de justice ?

Les médias se sont curieusement focalisés sur la tribune Boulogne, celle de la victime pourtant, quitte à faire passer pour images de "hooligans" du PSG les photos de supporters madrilènes, voire de supporters... du Hapoël ! Ils n'ont pas jugé utile de porter un même regard scrutateur sur les autres tribunes, celle des visiteurs notamment, ou même sur la tribune de luxe, dite présidentielle, où des propos de même nature que ceux qui valent exclusion aux supporters du KOB sont pourtant rapportés. Et puisque l'on en est à prendre des mesures contre ceux qui crient des injures et tiennent des propos racistes pendant les matchs de football, je demande qu'on sévisse aussi contre les "pétasses" - parce que, oui, c'étaient des jeunes filles - qui gueulaient "A mort l'arbitre" et "A mort les Brésiliens" pendant le match France-Brésil de la dernière coupe du monde retransmis sur grand écran dans un café d'un quartier "branché" du centre de Paris. J'y étais. Je suis prête à témoigner.

Quant au projet d'augmenter encore le tarif des entrées et des abonnements aux tribunes du Parc des Princes, il entraînera de fait l'exclusion de stade des revenus modestes...

Mais c'est qu'il faut maintenant par tous les moyens faire oublier que le mort était innocent. Le scandale du lynchage médiatique qui a suivi la mort de Julien serait trop grand si le public en avait pleine conscience. Je garde en mémoire les propos de ma marchande de journaux, une gentille dame pourtant. Comme je lui disais mon étonnement devant les réactions de la presse à la mort de ce jeune homme, "Ah, mais c'est bien fait ! Les supporters, c'est des racistes !", me fit-elle, rejoignant ainsi la déclaration assez abjecte de Joaquin Masanet, secrétaire général du syndicat UNSA-police déjà cité : "Je déplore qu’il y ait eu un mort, mais c’est quand même des racistes". Je ne savais pas que la peine de mort était rétablie en France. Ravie de l'apprendre !

Un dernier témoignage :
  • Julien Quemener, lui, a quitté le Parc des Princes dès la fin de la rencontre, en compagnie d'Alexandre, son meilleur ami, qui nous raconte comment les faits se sont enchaînés : " Nous nous dirigeons ensemble vers la place de la Porte de Saint-Cloud. Julien veut reprendre sa voiture, qui est garée de l'autre côté de la Porte de Saint-Cloud, car il a un rendez-vous dans Paris. Moi, je veux rejoindre la station de métro de la Porte de Saint-Cloud car je dois rentrer chez moi, dans l'Essonne, en transports en commun. Je suis séparé de Julien à l'extrémité du boulevard Murat, suite à une charge des CRS, situés à proximité de la brasserie des Trois Obus. Nous réussissons à nous retrouver ensuite au bord du boulevard périphérique. Je n'ai plus du tout envie de prendre le métro dans ces conditions et nous décidons alors de rejoindre tous les deux la voiture de Julien. Nous repartons donc ensuite dans la gueule du loup pour traverser la place. Ça chauffe vraiment. Nous sommes sur la route, au milieu de la place, entre le boulevard Murat et l'avenue de Versailles. Nous n'avons pas encore atteint le McDonald's quand je vois une ou deux grenades lacrymogènes lancées par les CRS exploser près de nous. Ça me pique les yeux et, du coup, je fonce vers les arrêts de bus, à l'autre bout de la place. À partir de cet instant, je n'ai plus jamais revu Julien vivant... " Alexandre ne sait donc rien de ce que son ami Julien va faire dans les deux ou trois minutes qui vont suivre. Lorsqu'on retrouve la trace de Julien, il est mort.
http://www.myfreesport.fr/sports/football/ligue1/0/drame-psg-qui-dit-verite-8464.html?xtor=SEC-13&gclid=COKVvvDy84gCFRZZXgodxU0Ouw

Donc, si l'on en croit la version officielle : en 2 mn, Julien renonce à son rendez-vous en ville, se transforme en violent hooligan-fasciste-raciste-antisémite, et se met tout de go à agresser des juifs et à insulter des noirs... (et à crier au milieu des gaz lacrymogènes : Votez Front National !). Très crédible, vous ne trouvez pas ?!

Mais alors que l'information mensongère "Julien, sale raciste, bien fait pour lui" a bénéficié d'une très large couverture médiatique, l'information qui se confirme "Granomort, malade mental affabulateur et dangereux" n'aura pas une diffusion équivalente. De sorte que, même si la vérité peu à peu se fait jour, la plupart des gens n'auront eu vent que de la première version. Sans compter que la justice refuse de juger. Et c'est ainsi que l'on crache sur les tombes...

L'état de la France

Aussi anecdotique qu'elle puisse paraître, l'affaire en dit beaucoup sur l'état de la France ; la collusion des politiques et des médias, ici manifeste ; la déliquescence morale de la justice qui libère si facilement de dangereux criminels (Bodein, Gateau), décide de ne pas poursuivre un meurtrier (Granomort), mais par une étrange inversion de l'échelle des peines, sévira volontiers contre tout propos suspect de phobie envers telle ou telle "communauté" (Houellebecq et compagnie), sans parler des innocents que l'on jette en prison (Outreau), des peines disproportionnées (Lajoie) et des juges au-dessus des lois (Zamour, Renard) ; le recrutement des unités de police hâtivement créées ces derniers temps, comme cette police des transports à laquelle appartient Granomort, où des critères raciaux semblent prévaloir sur la compétence et la probité ; ou encore les manipulations de l'opinion.

Etonnant aussi ce retour soudain de la notion de légitime défense qui semblait avoir disparu, sinon du code pénal, du moins de l'esprit des juges. N'a-t-on pas vu souvent des policiers inculpés pour meurtre dans des cas où la légitime défense était pourtant autrement plus flagrante qu'elle ne l'est ici ? Tout récemment un commerçant agressé à son domicile par trois cambrioleurs qui menaçaient sa femme de viol est parvenu à retourner l'arme d'un de ses agresseurs et a tiré (et tué) l'un d'eux. Légitime défense ? Point du tout, a jugé le juge d'instruction : l'homme a été incarcéré ...avant d'être remis en liberté sur pressions politiques. Il reste cependant inculpé. Alors pourquoi Granomort n'est-il inculpé de rien ?
  • Art. 122-5 du Code Pénal : "N’est pas pénalement responsable la personne qui, devant une atteinte injustifiée envers elle-même ou autrui, accomplit, dans le même temps, un acte commandé par la nécessité de la légitime défense d’elle-même ou d’autrui, sauf s’il y a disproportion entre les moyens de défense employés et la gravité de l’atteinte."
  • Art. 122-7 : "N’est pas pénalement responsable la personne qui, face à un danger actuel ou imminent qui menace elle-même, autrui ou un bien, accomplit un acte nécessaire à la sauvegarde de la personne ou du bien, sauf s’il y a disproportion entre les moyens employés et la gravité de la menace."
La légitime défense ne saurait en tous cas prévaloir en ce qui concerne la mort de Julien puisque, au contraire de Mounir Bechaer, celui-ci ne faisait pas partie des agresseurs supposés. Et même en ce qui concerne la blessure par balle de Mounir, l'état de légitime défense n'est pas du tout démontré, Mounir n'étant pas armé (il n'a d'ailleurs pas l'air d'une brute, alors que le policier fait plutôt peur à voir, mais ceci bien sûr est très subjectif).

Mais le cas Granomort n'est pas isolé. On peut le rapprocher de plusieurs autres affaires mettant en scène des mythomanes en mal de reconnaissance. Elles se sont multipliées ces derniers temps et on comprend d'ailleurs très bien pourquoi quand on voit que c'est précisément à ces affaires que les médias ont donné le plus large écho, ce qui ne peut que susciter de nouvelles vocations... Rappelons-nous :
  • L'affaire Nouchet, le 16 janvier 2004 : Sébastien Nouchet accusait des homophobes d'avoir essayé de le brûler vif. Ses accusations se sont révélées depuis sans fondement. Il s'était très probablement mutilé lui-même.
  • L'affaire du RER D, le 9 juillet 2004 : Marie-Léonie Leblanc disait avoir été victime d'une agression à caractère antisémite dans le RER, bien que n'étant pas juive. Il s'avéra peu après qu'elle s'était elle-même dessiné au marqueur des croix gammées sur le ventre.
  • L'affaire Redeker, le 19 septembre 2006 : Au lendemain de la publication d'une tribune dans Le Figaro, l'auteur de celle-ci, Robert Redeker, professeur de lycée, affirme être sous le coup d'une fatwa islamiste... qui semble n'avoir jamais été prononcée.
  • L'affaire d'Espirat, le 26 septembre 2006 : La maison de François Philippe part en fumée. Il accuse le racisme des habitants du village. Un mois plus tard, il a reconnu être lui-même l'auteur, entre autres choses, des inscriptions racistes sur son mur et de l'incendie de sa propre maison, cf. http://club-acacia.over-blog.com/article-4755420.html.
Les mythomanes pullulent. Il faut croire que l'époque s'y prête. Devenir une célébrité médiatique en quelques minutes, c'est tellement simple, tellement tentant. Faire parler de soi, rencontrer les ministres, recevoir un mot du président... Il suffit d'être une victime. La gloire, quoi ! Les esprits fragiles s'y laissent prendre, ils s'adaptent tant bien que mal aux thèmes médiatiques du moment, et la presse applaudit !


JUSTICE POUR JULIEN



Vidéos en hommage à Julien Quemener :
www.dailymotion.com/DAFRIZ/video/xrj4b_julien-01
www.youtube.com/watch?v=O-xDu6O0Ruo
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9 décembre 2006 6 09 /12 /décembre /2006 00:11
Le texte qui suit est paru jeudi 7 décembre en deuxième page du journal turc Cumhuriyet ("Le public"). De tendance kémaliste de gauche, tirant à plus de 70.000 exemplaires, Cumhuriyet est le grand quotidien intellectuel d'Istanbul.


France – démocratie ?


N’est-il pas inquiétant qu’en France, pays autoproclamé des Droits de l’homme et de la Liberté guidant le genre humain – bien malgré lui parfois, – une police de la pensée et sa cohorte de délateurs improvisés passent leur temps à surveiller ce que les Français disent, pensent ou écrivent ? Les intentions vertueuses dont ces censeurs se réclament résistent mal à l’examen lorsqu’on s’avise de gratter un peu leur vernis de vertu démocratique, et leurs raisons tiennent plutôt de la même joie mauvaise que celle des puritains américains découvrant une tache suspecte sur la robe d’une stagiaire de Monsieur Clinton. Car les crimes-pensées de ce nouveau monde orwellien ne se limitent pas à la négation des camps d’extermination de la IInde Guerre mondiale, négationnisme au demeurant beaucoup plus rare et marginal que les censeurs veulent le laisser croire. Mais l’anti-fascisme vertueux a un besoin vital du " fascisme " qui joue si bien son rôle de repoussoir et sans lequel il ne saurait exister, au point de le réinventer si nécessaire...

Voici que l’Assemblée nationale française vote à tour de bras de nouvelles lois " mémorielles ", la dernière en date étant celle sur le génocide arménien de 1915. Désormais, toute personne exprimant un avis contraire, voire un doute sur la réalité de ces massacres sera passible d’un an de prison et de 45.000 euros d’amende. Au regard des lois françaises et du fonctionnement actuel de l’institution judiciaire, un délinquant ou un criminel avéré n’en risque souvent pas davantage. Mais on ne trouve pas de mots assez durs contre les nouveaux délinquants de la pensée – nouveaux parce que le délit était encore il y a peu complètement ignoré du code pénal. A entendre certains censeurs, ils seraient pires que les assassins eux-mêmes… Et la liste des pensées non conformes qui font de l’honnête citoyen un abominable criminel n’est pas close. On attend la loi sur le génocide des Indiens de l’Uruguay, celle sur l’extermination des tribus indiennes d’Amérique du Nord, celle sur les millions de morts du régime soviétique, sur le génocide perpétré par les Khmers rouges, la Révolution culturelle chinoise, les massacres en Ossétie des années 1989-1992, etc.

De cette inflation législative, que pense l’historien ? L’Assemblée nationale s’est bien gardée de demander son avis. Or, pour l’historien, le référent n’est pas et ne saurait être la Loi, mais la vérité historique. Et cette vérité, à défaut de la détenir pleine et entière, l’historien intègre cherche à s’en approcher à travers les sources et les témoignages qu’il rassemble, confronte, critique et analyse en une quête sans fin. Alors comment une loi peut-elle fixer des faits – et punir d’emprisonnement leur contestation – qui sont toujours objets d’étude et de questionnement pour la recherche historique ? Comment une loi peut-elle décréter l’Histoire sans contraindre, stériliser et finalement interdire la recherche historique elle-même ? Et au-delà de la liberté de la recherche, la liberté du citoyen n’est-elle pas aussi de dire des âneries si bon lui semble ?

La Turquie au miroir de la France

Quelle mouche a donc piqué nos députés ? Il faut d’abord reconnaître que les députés français aimeraient bien se rendre utiles. Depuis qu’ils ne servent plus pour l’essentiel qu’à enregistrer les lois votées par le Parlement de Bruxelles et à inscrire dans le droit français les règlements européens, il faut bien que de temps à autre ils justifient leur existence et leurs émoluments. D’où la prolifération de lois confuses et qui ne servent à rien. Jamais le code législatif n’a été aussi volumineux et aussi mal écrit, au point qu’aujourd’hui, contrairement à l’adage qui voudrait que " nul n’est censé ignorer la loi ", les juges eux-mêmes n’y comprennent rien…

Mais il y a des raisons plus profondes aux lubies soudaines des députés français. Car, trêve de bons sentiments : en quoi les relations entre l’Arménie et la Turquie nous concernent-elles à ce point ? Est-ce vraiment à la France de dicter aux autres leur propre Histoire, alors même que nos autorités se montrent incapables de considérer en face tant d’épisodes tragiques de l’Histoire de France, à commencer par les massacres de la Révolution française et le génocide vendéen que les manuels de l’Ecole publique passent toujours sous silence ? Et la décision française contribue-t-elle en quoi que ce soit à apaiser les tensions entre Turcs et Arméniens ? A dire vrai, cette décision relève sans doute bien davantage de questions franco-françaises que d’une réelle sollicitude pour les populations concernées. Nos députés, pour la plupart, seraient d’ailleurs bien en peine de situer l’Arménie sur une carte et n’ont qu’une très vague idée, s’ils en ont, de la situation des Chrétiens d’Orient. On se paie de mots. Cette loi met peut-être du baume au cœur des Arméniens, mais elle ne nous coûte pas grand-chose, tandis que les investissements économiques de la France en Arménie restent loin derrière ceux de la Russie, l’Iran, la Belgique, l’Allemagne, Israël, les USA… ou la Turquie ! Ce ne sont-là que paroles et larmes de crocodile, comme n’étaient que paroles les protestations d’amitié de la France auprès des Libanais bombardés.

Alors quoi ? Est-ce une façon pour la classe politique d’écarter sans en avoir l’air ce qu’elle avait jusqu’ici soutenu mordicus, à savoir l’intégration de la Turquie dans l’Union européenne ? Une façon d’éluder le problème – car c’en est un – tout en se drapant du manteau de la vertu ? J’y verrais aussi une nouvelle manifestation d’une pathologie qui frappe depuis au moins 30 ans l’Europe occidentale en général et la France en particulier, et qui relève de la psychanalyse des peuples. Appelons-la masochisme, haine de soi ou, tout simplement, dépression. Cette pathologie se trouve renforcée par l’importation du communautarisme à l’américaine qui reconnaît des droits particuliers, autrement dit des privilèges, à des ensembles de personnes définis comme "communautés" par leur ethnie, leur religion ou leurs mœurs. Et l’un des arguments les plus efficaces pour obtenir des privilèges d’un Etat atteint de dépression, c’est celui d’avoir été victime à un moment ou à un autre de l’Histoire mouvementée des peuples. Aux victimes, réparation est due. Mais qui dit victimes implique aussi de désigner des bourreaux. Et c’est là que la Loi fige les rôles. L’Histoire étant ce qu’elle est, on ne pouvait cependant tenir les Juifs pour seules victimes. Les condamnations du Tribunal de Nuremberg et le délit de négationnisme qui en procède ne devaient pas rester isolés, au risque d’un autre délit fort répréhensible : la discrimination. Les avantages matériels qu’on peut escompter du statut officiel de victimes ont sans doute aussi suscité quelques vocations. Après les Noirs Africains, supposées victimes de l’esclavage, et les Maghrébins, victimes de la colonisation, il était juste que les Arméniens de France fassent entendre leur petite voix.

Que vient faire la Turquie là-dedans, me direz-vous ? C’est que la Turquie est en quelque sorte au miroir de la France. La France s’imagine coupable d’un lourd péché qui serait son passé. Or, à certains égards, la Turquie nous ressemble. N’avons-nous pas succédé aux Turcs en Afrique du Nord ? Le Turc a, comme nous, colonisé et dominé les Arabes. Et selon la perspective politico-masochiste actuelle, c’est mal. Depuis la mauvaise publicité qu’en fit Lawrence d’Arabie, le Turc est un méchant de l’Histoire, méchant surtout contre l’une des communautés que nos autorités veulent reconnaître victimes officielles : moins les Arméniens à dire vrai que les Arabes. Alors les Français, atteints de ce mal qu’est la haine de soi, ne comprennent pas pourquoi les Turcs ne pratiquent pas comme eux-mêmes la repentance. Bienvenue en Europe !
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3 décembre 2006 7 03 /12 /décembre /2006 18:29
JUSTICE POUR JULIEN  Justice pour Julien

Suite de l'enquête  Vous avez dit racisme ?
  • "A mon arrivée hier soir au parc des princes, j'ai été surpris du dispositif de sécurité mis en place. Très peu de présence policière autour du stade..." "[...] que dire des dirigeants parisiens qui ont mis en place  le même dispositif pour ce match que pour un match contre Troyes ?" (http://sefairefoot.canalblog.com).
Ceci m'a d'ailleurs été confirmé de vive voix depuis par un fidèle du PSG de longue date. Vers 16h, il n'y avait pas encore de forces de l'ordre aux abords du stade, alors que pour les rencontres avec l'OM, par exemple, elles sont omniprésentes dès le milieu d'après-midi.

Le déroulement du match et l'ambiance dans les tribunes présageaient déjà de bagarres à la sortie. Les services de police présents dans le stade en étaient assurément conscients et, à défaut d'avoir été prévus dès le début, des renforts auraient pu, auraient dû être acheminés durant la seconde mi-temps. Mais là-encore, il n'en fut rien... Suivons encore notre premier témoin :
  • "Réalisant que la sécurité est défaillante et que les forces de l'ordre ne sont pas assez présentes, le PSG réagit enfin. A quelques minutes du terme, le speaker annonce que les visiteurs doivent rester en tribunes. Problème : de nombreux parisiens sont venus soutenir l'Hapoël en tribunes latérales. [...] Les fans de Boulogne enlèvent les bâches, et quittent le stade. Ceux d'Auteuil font de même..."
Et les affrontements peuvent commencer. La sortie des supporters du Hapoël ayant été différée, c'est avec les CRS - une vieille tradition - que les premiers ont lieu, d'abord autour du Parc, puis sur la place de la Porte de Saint-Cloud voisine.

  • Autre témoignage : "A la fin du match, j'ai dû faire demi-tour quand des gens nous ont prévenu qu'il y avait des incidents au bout de la rue du Commandant Guilbaud entre CRS et supps de Boulogne. Je suis donc passé par une rue parallèle où qu'elle ne fût pas ma surprise d'y trouver des dizaines de CRS et de policiers en tout genre à pied, en voiture, à côté du bus, stationnés là à rien faire... Je me suis dit: "Mais que font-ils là ? Ne seraient-ils pas plus utiles porte de Saint-Cloud ?"
Jusqu'ici les témoignages sont concordants, à quelques nuances près suivant l'endroit où chacun était placé dans le stade. Mais pour ce qui est du récit du drame, les versions des trois principaux protagonistes se révèlent contradictoires sur plusieurs points essentiels. Je résume en essayant de ne retenir que les extraits les moins sujets à caution :

Yanniv Hazout, étudiant en management de 23 ans, est à l'ordinaire supporter du PSG, mais, de confession juive, il est venu ce soir-là avec des amis soutenir le club israélien. Ils sont placés en tribune présidentielle, à proximité de la tribune Auteuil. Entrevue pour le magazine Sport (extraits) :

Quel chemin décidez-vous d'emprunter pour quitter le stade ?
  • - On quitte la tribune présidentielle et on longe la tribune Auteuil avant de retrouver le boulevard Murat. Plus on s'approche de la place de la Porte de Saint-Cloud et plus on rencontre de supporters du PSG appartenant au kop de Boulogne. A cette heure-là, il y a encore beaucoup de monde dans la rue et on sent une tension... On voyait au loin des échauffourées entre les CRS et les supporters parisiens."
Comment la soirée a-t-elle basculé?
  • - Des supporters du PSG étaient placés de chaque côté du trottoir et tenaient des propos antisémites. Ils lançaient des " sales juifs ! " à la cantonade. A cet instant, nous arrivons à proximité de la place de la Porte de Saint-Cloud. Quand on entend ces insultes, moi et mes amis tournons la tête pour savoir d'où elles proviennent. Pour eux, c'est comme si on s'était désignés. Nous, nous poursuivons notre chemin.
Combien de personnes vous prennent en chasse ?
  • A chaque fois que je me retourne, je vois deux ou trois personnes à cinq mètres derrière nous.
Comment êtes-vous séparé des amis qui vous accompagnent ?
  • Je me dirige vers les arrêts de bus situés sur la place, diamétralement opposés au McDonald's. Je m'arrête un instant et je constate que mes deux amis sont partis dans une autre direction. Dans le même temps, deux de mes " chasseurs " m'ont quasiment rejoint. Je m'échappe et reprends mes distances. [...]
[Ici quelques remarques s'imposent : 1. les poursuivants éventuels étaient peu nombreux et non des centaines comme on l'a prétendu ; 2. à aucun moment ce jeune homme n'a été rattrapé, ni blessé par qui que ce soit.]

Et là, que se passe-t-il ?
  • Un homme arrive en courant depuis le centre de la place de la porte de Saint-Cloud. Il est noir, environ la trentaine, porte un gros pull blanc, un jean, un béret et des lunettes. Il glisse par terre et reçoit quelques coups. Il se replace ensuite devant moi, face à mes poursuivants et brandit une bombe lacrymogène qu'il actionne à deux reprises. Cela a pour effet de disperser les " chasseurs " les plus proches.
 Porte-t-il un brassard de police?
  • Non. Il n'a pas de signe distinctif. [...]
A quel moment dégaine-t-il son arme pour la première fois ?
  • Dès qu'il n'a plus de gaz lacrymogène. Il sort alors son arme et la pointe sur les supporters.
[Dans une autre déclaration, Yanniv dira ceci : "Je me suis mis à courir quand je me suis senti menacé par les personnes qui couraient derrière moi. J'avais fait 200 ou 300 mètres sur la place et là, il y a eu un policier qui s'est interposé entre nous pour disperser la foule et les dissuader de continuer. A ce moment là, honnêtement, il n'y en avait que trois ou quatre et si je continuais à courir cela se serait terminé". L'intervention de ce personnage, qui se révélera être un policier, était donc superflue... Ceci est aussi à mettre en regard de l'assertion du procureur de la République de Paris, Jean-Claude Marin, selon lequel : "Les deux hommes ont été pris à partie par une foule d'une centaine de personnes" (sic).]

A combien de personnes faîtes-vous face ?
  • Quatre ou cinq se montrent particulièrement virulents envers le policier. Je me place derrière lui et l'on progresse alors à reculons et à pas chassés. C'est moi qui le guide. Je vois des voitures de police passer à proximité du McDonald's, ce qui m'incite à aller dans cette direction. Seulement, quand je me retourne une nouvelle fois, ces voitures ne sont plus là. D'ailleurs, quand on y pense, c'est incroyable qu'il n'y ait pas de policiers à cet endroit-là.
 Vous continuez tout de même à vous diriger vers le McDonald's...
  • Oui. On se faufile entre les voitures qui passent sur la place de la Porte de Saint-Cloud. Les mecs balancent des bouteilles de bière vides dans notre direction. Lesquelles s'écrasent sans nous toucher. Finalement, dans toute cette histoire, je n'ai pas eu une éraflure. [...]
Que se passe-t-il ensuite ?
  • On accélère le pas pour tenter de se réfugier à l'intérieur du McDo. Le policier glisse à nouveau, sur le trottoir, et pose un genou à terre. [...] Il se relève. Debout, il pointe son arme en l'air à 60 degrés [...]. Certains supporters crient : " C'est un faux à grenailles ". Quand il tire, cela me rassure car, moi-même, je ne savais pas s'il s'agissait d'une arme véritable et s'il était réellement un policier.
[Visiblement, au vu de la tenue de l'individu et de son comportement maladroit, personne ne soupçonnait en fait qu'il puisse être policier. Les témoins divergent sur la question de savoir s'il a crié "Police !" ou pas, et Yanniv se contredit d'ailleurs lui-même sur ce point. Toujours est-il que personne n'y a cru. Et contrairement à ce qui a été dit, Yanniv n'a pas du tout sollicité son aide]

A ce moment-là, tire-t-il à bout portant sur un individu ?
  • Je n'ai pas le souvenir que l'arme touche le corps d'un quelconque individu. Je me souviens seulement d'un coup de feu tiré en l'air. C'est d'ailleurs la seule détonation que j'ai entendue. Si le coup de feu avait touché quelqu'un, je l'aurais vu. J'étais placé juste derrière lui, à 1m. Or, je n'ai vu personne tomber. [...]
 L'avez-vous vu ou entendu tirer ?
  • Oui, j'ai vu le coup partir. J'étais à l'extérieur du restaurant, je le répète, un mètre derrière lui.
Confirmez-vous qu'il n'y a eu qu'une seule détonation ?
  • Oui, j'en suis sûr et certain.
(www.myfreesport.fr/sports/football/0/exclusif-recit-integral-temoin-essentiel-drame-psg-8108.html)

Ces derniers propos laissent perplexe. Un "tir à 60°", c'est du langage de policier. Comment se fait-il que Yanniv emploie cette expression... qui reprend mot pour mot la déclaration du policier lui-même ? Je cite : Le policier a expliqué avoir tiré "à un angle de soixante degrés plutôt en l'air en direction de quelqu'un qui se situe entre 50 centimètres et un mètre". Quand un coup de feu est tiré, le plus important est quand même de savoir sur qui... Il est étonnant que Yanniv n'ai gardé aucun souvenir du moment crucial alors qu'il dit être à un mètre du policier et que la première victime, Mounir Bouchaer, touché en pleine poitrine, est aussi à un mètre... et je ne pense pas qu'avec le poumon perforé il soit resté debout bien longtemps. De plus, si je ne sais pas ce qu'est un tir à 60°, je sais en revanche que tirer en l'air, ce n'est pas du tout la même chose que de tirer dans la poitrine de quelqu'un. Il s'agit bien d'un tir à hauteur d'homme et pratiquement à bout portant.

Le premier récit du policier - puisque malgré les apparences et les "gaffes", c'est bien d'un policier qu'il s'agissait - est sensiblement différent...
  • "J'ai pris un premier coup de pied qui m'a jeté à terre. J'ai reçu un autre coup et j'ai perdu mes lunettes de vue."
  • Puis, alors que, prétend-il, il est allongé sur le trottoir : 
  • "J'ai vu le groupe grossir. Au moment où je sortais mon arme de son étui, j'ai vu comme une ombre impressionnante qui fonçait sur moi [un mamouth préhistorique ?]. J'étais couché sur le côté. J'ai pris appui sur mon bras et j'ai tiré au jugé. J'ai bien eu l'impression de viser en l'air..."
  • (Paris Match, n° 3002, 29 novembre 2006, p. 70-73)
Premières contradictions flagrantes et premiers mensonges. Le policier dit n'avoir dégainé qu'une fois à terre, alors que tous les témoins et Yanniv compris l'ont vu debout l'arme au point peu de temps après son entrée en scène. Il prétend en outre avoir tiré depuis le sol, ce qui est non seulement contredit par les témoins, mais l'est surtout par une étude élémentaire de trajectoire : la balle, après avoir traversé la poitrine de Mounir de part en part, comme on peut en juger sur la vidéo ici (www.pariscasuals.com/html/accueil.php), ira frapper Julien en plein cœur, ce qui implique un tir debout à l'horizontale, et non du bas vers le haut. Mounir le confirmera depuis son lit d'hôpital :
  • Le Figaro : Le policier a été frappé, il vous a tiré dessus alors qu’il était à terre.
  • M. Bouchaier : C’est complètement faux. La trajectoire de la balle est droite parce que le policier m’a tiré dessus à bout portant, alors qu’il était debout. Elle m’a perforé le poumon et m’a fracturé une côte. J’ai frôlé la mort.

Menteur invétéré

C'est que le policier en cause n'en est pas à son premier exploit. Antoine Granomort était en effet déjà assigné à comparaître devant la justice le 20 juin 2007 pour une autre affaire édifiante. Il sera jugé en correctionnelle pour "escroquerie" et "dénonciation d'infraction imaginaire". D'après Le Figaro et Le Nouvel Observateur :

  • L’histoire remonte à février-mars 2005 [ou 2004 ?]. Un homme dépose plainte pour une escroquerie sur sa carte de crédit. Une enquête préliminaire est alors ouverte par " la section des fraudes aux moyens de paiement " au parquet du pôle financier parisien et révèle que la carte bleue a été frauduleusement utilisée à 44 reprises pour un montant global de 13 200 euros. Les soupçons se tournent vers Antoine Granomort, le gendre du détenteur de la carte de crédit. Mais  devant les enquêteurs, le policier explique, pour se justifier, qu’il aurait été séquestré par un groupe d’individus qui auraient abusé de lui, le contraignant à leur remettre des fonds à plusieurs reprises. Antoine Granomort a même déposé plainte pour ces faits.
  • Les investigations immédiatement engagées pour " extorsion aggravée et viol en réunion " ont tôt fait de démontrer que le policier n’a été victime d’aucune agression et que la dénonciation est mensongère. De source judiciaire, on explique qu’Antoine Granomort aurait tout simplement utilisé la carte bleue de son beau-père puis monté " un gigantesque mensonge " pour se couvrir.
Pour justifier un premier délit crapuleux, le policier Granomort, alors employé de la Direction de l'ordre public et de la circulation (DOPC) depuis 2003, avait donc déclaré avoir été enlevé, séquestré, violé (!) et mis à rançon de 15.000 euros, d'où l'emprunt indélicat d'une carte bleue... Et il avait à son tour porté plainte. Un mensonge en appellant un autre, le policier prétendait aussi que trois ans plus tôt, en 2001, il aurait lui-même extorqué un peu plus de 5.400 euros (36.000 francs à l'époque) à des "acheteurs de drogue" au cours d'une arnaque. Ce sont ces derniers qui, selon ses dires, lui réclamaient de l'argent sous peine de représailles... Mais très vite les enquêteurs avaient établi la fausseté de ces affirmations et le faux plaignant encourt cinq ans de prison, 375.000 euros d'amende et d'éventuelles sanctions disciplinaires.

Le plus étonnant de l'affaire est que cet escroc affabulateur, qui exerçait peut-être aussi à ses heures perdues l'honnête métier de revendeur de drogue... n'ait pas été aussitôt suspendu de ses fonctions et continue d'exercer ses talents dans la police, talents auxquels s'ajoute maintenant celui de meurtrier !

Mais quelques précisions cliniques s'imposent :
  • La mythomanie, décrite par Dupré en 1905, est une tendance plus ou moins volontaire et consciente aux mensonges et à la création de récits imaginaires. Alors que le mensonge normal est épisodique, motivé et proportionnel à son but (par exemple le mensonge par charité), le mensonge pathologique est à la base de la fiction fantasmatique du récit du mythomane.
  • La mythomanie n'est donc pas seulement l'action de fabuler ni celle de mentir. C'est une véritable constitution, un type de déséquilibre entraînant l'élaboration de récits d'événements et d'actes qui n'ont pas eu lieu mais que le malade fait croire à autrui. Il dit en avoir été le témoin ou l'acteur et s'y décrit souvent dans une position avantageuse, ou au bénéfice secondaire important (par exemple pour rechercher à se faire plaindre).
  • Quand cette tendance persiste après la fin de l'adolescence, elle est considérée comme un trouble du comportement. Elle est alors qualifiée de mythomanie et peut, non traitée, annoncer un désordre psychiatrique plus grave : névrose ou même psychose.

Alors un "héros qui mérite la légion d'honneur", Granomort ? Ou un malade mental qui, en l'absence de traitement psychiatrique approprié, présente un risque certain de récidive ? Il serait peut-être bon de se demander si ce passage à l'acte que constitue le meurtre d'un supporter du PSG n'est pas un premier épisode psychotique...

Meurtre ou assassinat, la question reste posée, car compte-tenu du profil psychologique du personnage et de son comportement agité, fort peu professionnel (sans prévenir ses collègues, il se précipite seul vers un groupe de supporters, les asperge de gaz lacrymogène et tire...), on peut à bon droit se demander si cette action de mauvais werstern n'a pas été voulue par lui et préméditée. Ne voulait-il pas se faire passer pour un héros ? D'ailleurs, d'Antoine Granomort "le sauveur", de Yanniv Hazout ("c'est moi qui le guide") ou de Mounir Bouchaer, c'est à qui sera le héros de l'histoire. Mais Julien Quemener, lui, n'avait rien demandé.

Pourtant moins de 24 heures après la mort de Julien, alors que le principal témoin, Mounir Bouchaer, grièvement blessé, n'est toujours pas entendu, le procureur de la république conclut en toute hâte à un cas de légitime défense. Le vendredi 24 novembre en fin de journée, Jean-Claude Marin, procureur de la République de Paris, tient en effet une conférence de presse. Passant outre les témoignages contradictoires, il affirme que le policier "a opté pour une attitude courageuse en protégeant un supporter du club de Tel-Aviv ", qu'il a dû faire face "à une horde de personnes excitées et extrêmement agressives" et qu'il a agi "dans un état de légitime défense". Et le surlendemain, Antoine Granomort, entendu par le juge d'instruction en qualité de simple " témoin assisté ", est laissé libre. Il ne sera pas inculpé...

Le procureur semble donc avoir accordé le plus grand crédit aux déclarations du policier puisque c'est sa version des faits qu'il retient. On aurait pu supposer que dans les premiers moments après le drame, la justice n'était pas au courant des antécédents de Monsieur Granomort. Mais d'après un témoignage recueilli par Libération dans les milieux judiciaires, il n'en est rien : "Ce passif que nous connaissions n'entache pas sa crédibilité. On peut se retrouver dans une carambouille et se comporter de façon remarquable."

Comment peut-on oser dire que la mythomanie d'un individu n'entache pas sa crédibilité ???
L'affaire Granomort : un simple fait-divers ?
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2 décembre 2006 6 02 /12 /décembre /2006 14:11
JUSTICE POUR JULIEN Justice pour Julien  (suite)

Pour revenir aux faits et au contexte (et petit excursus sur les supporters... de Tel Aviv)

Le jeudi 23 novembre au stade du Parc des Princes dans le XVIe arrondissement de Paris, dans le cadre de la Coupe de l'UEFA (Union européenne de football), un match opposait l'équipe locale, le PSG, à une équipe israëlienne, le Hapoël Tel Aviv. Compte-tenu de l'écho particulier des guerres du Proche-Orient sur les jeunes gens d'origine maghrébine, nombreux parmi les supporters du PSG, notamment dans la tribune "Auteuil", et compte-tenu aussi du soutien que des mouvements violents comme la LDJ et le Bétar étaient susceptibles de manifester en faveur de l'équipe adverse, les Renseignements généraux avaient classé le match à haut risque et alerté la préfecture de Paris afin que les moyens policiers déployés fussent suffisants pour éviter les incidents. Cependant, pour une raison qui reste à ce jour inexpliquée, le préfet Pierre Mutz n'accorda aucune considération à cet avis qui était de simple bon sens. Sa décision sera lourde de conséquences : au lieu des quelque 2.000 policiers d'ordinaire mobilisés pour un match à risque, ce ne sont que 600 policiers qui seront présents ce soir-là (pour près de 22.000 spectateurs). Au lieu d'un large périmètre sous surveillance (qui aurait englobé la place de la Porte de Saint-Cloud...), un périmètre étroit aux abords immédiats du stade.

Il y avait pourtant de sérieuses raisons de renforcer la sécurité autour d'un match comme celui-là, car les supporters du Hapoël Tel Aviv, dont nos médias n'ont pas du tout parlé, ne sont pas réputés des anges. Et en matière de racisme les supporters israëliens ne sont pas en reste. En voici quelques témoignages :
  • Echelle du racisme : Les supporters de Hapoel Tel-Aviv et de Sakhnine en tête de liste
    L'évaluation de l'échelle du racisme et de violence [un nouvel indicateur mis en place dans le football israëlien pour tenter d'endiguer le phénomène] des trois premières semaines du tournoi de football a placé les supporters des équipes Hapoel Tel-Aviv et l'Union des Fils de Sakhnine en tête de liste avec 12 points négatifs pour chacune de ces deux équipes. Viennent en troisième position les supporters de Beitar Jérusalem, de Maccabi Tel-Aviv et de Beer-Sheva avec 10 points négatifs pour chaque équipe. [...]

    Violence physique et racisme
    Les observateurs du Fonds ont signalé que la violence verbale pratiquée contre les arbitres et les joueurs était plus importante que d'habitude. C'est ainsi que les supporters de Hapoel Tel-Aviv ont insulté l'entraîneur Gili Landau et les membres du staff administratif de l'équipe à la suite de leur défaite face à Ashdod. Certains supporters ont même essayé d'agresser par des jets d'objets les membres du staff administratif.

    A Kiryat-Eliezer, les supporters de l'Union des Fils de Sakhnine ont commis des actes de hooliganisme au cours du match qui opposait leur équipe à celle de Maccabi Tel-Aviv, agressant les policiers et les agents de sécurité. Certains d'entre eux ont jeté des verres et des bouteilles sur l'arbitre Alon Yafet et sur les arbitres de touche. Le leader des supporters de cette équipe a demandé plusieurs fois à ces derniers d'arrêter la violence et de garder un esprit sportif.

    Les supporters de Beitar Jérusalem ont harcelé les policiers au cours du match qui opposait leur équipe à Maccabi Petah Tikva. Nombre de supporters de Maccabi Tel-Aviv ont scandé " Mort aux Arabes " au cours du match face à l'Union des Fils de Sakhnine. Enfin les supporters de Hapoel Beer-Sheva ont reçu une note humiliante parce qu'ils ont réservé des huées au joueur de centre de l'équipe de Haïfa, Mzoua Ensoumba, de nationalité congolaise."
    (www.aad-online.org/2004/Fresnchsite/Frenchlinks/11-10fr/1.htm)
  • Par Jerrold Kessel et Pierre Klochendler (6 décembre 2004) :
     
    [...] Lors du même match face à Bnei Yehuda, à chaque fois que les joueurs de Bnei Sakhnin [club arabe israélien] attaquaient, les huées s'orchestraient. Outre les cris sarcastiques à caractère politique, mais qui restent licites, comme " Souha est veuve, Souha est veuve ", ou encore " Celui qui ne bondit pas est un martyr ", le cri sordide " Mort aux Arabes " a retenti à plusieurs reprises. Jimmy Rifat Turk, jadis figure de proue du foot israélien, estime que l'usage fréquent de ces slogans méprisables en a assuré la " légitimité ".

    Mais des slogans comme " Mort aux Arabes ", quel que soit le contexte dans lequel ils sont proférés, ne doivent-ils pas être considérés comme du racisme ? Il s'agit là d'une question qui n'a pas été proprement traitée lors de l'importante conférence co-organisée il y a dix jours par le Nouveau fonds israélien et le British Council, à l'hôtel Dan Acadia Hotel à Herzliya, sous le titre " Débarrassons le football du racisme et de l'incitation ".

    La victime n'a pas été invitée

    Ont été invités à cette conférence des hauts responsables de la Fédération Britannique de Football, laquelle a lancé ces dix dernières années une campagne réussie contre le racisme dans les stades de football en Grande-Bretagne. Parmi les invités figuraient également des sociologues de l'université de Brighton qui mènent, avec l'aide du British Council, une campagne pour promouvoir, à travers le football, l'esprit de fraternité entre enfants arabes et juifs de la Galilée. Des efforts nobles. Reste que les responsables du foot, les juristes et les responsables politiques et sécuritaires israéliens ayant participé à cette conférence, ont seulement reconnu des inconduites sans s'attaquer au vrai problème.

    Le vrai problème c'est le racisme qui se manifeste à travers la pratique de ce sport, et le degré avec lequel ce racisme s'inspire d'une situation politique complexe et d'un conflit national embrasé.

    Il faut souligner que le club Sakhnin n'est pas immunisé contre le racisme. Certains de ses supporters, tout comme les supporters des autres clubs du pays, n'hésitent pas à offenser les joueurs noirs des autres équipes en imitant le cri du singe, entre autres cris humiliants. Mais au plus haut niveau de la haine raciale, il se trouve que l'équipe Sakhnin est le paratonnerre qui s'attire tous les coups et les humiliations dirigés contre les joueurs et les supporters arabes. Curieusement, les victimes n'ont pas participé à la conférence.

    " Je ne suis qu'un footballeur "

    Mais les principaux accusés n'y avaient pas participé non plus, même pas au niveau de l'équipe qui aurait pu les représenter : le Betar Jérusalem. Aucun membre de cette équipe jérusalémite ne s'était donné la peine d'assister à cette conférence, à part l'éminent footballeur Lior Asulin. La saison dernière, celui-ci jouait pour Sakhnin qu'il a conduit à la Coupe en mai. Quand il intégré le Betar Jérusalem en été, certains supporters fanatiques ont demandé qu'il passe par des " rituels de purification " pour se faire pardonner son péché d'avoir joué pour une équipe arabe. Lors de cette conférence, Auslin n'a pu que " reconnaître que de telles choses existaient ". " Je laissais passer, en fin de compte je ne suis qu'un footballeur ", avait-il souligné.

    Le vrai hymne

    Une nouvelle loi, récemment approuvée par le gouvernement permettra de traduire en justice les supporters accusés d'incitation. Ce qui nous manque toujours, c'est un effort collectif pour faire face aux conséquences destructrices du slogan " Mort aux Arabes ". " En attendant, ce slogan restera le plus chanté dans les stades de foot ", regrette Achraf Abou Ghia, un ingénieur vivant à Sakhnin, et supporteur fidèle du club de son village."
    (www.walla.co.il)
  • Une échelle pour mesurer le racisme et l'incitation à la haine

    Le programme d'étude du phénomène de la violence et du racisme, géré par le Nouveau Fonds d'Israël, a été lancé lors de la saison 2003-2004 des championnats de football. Des observateurs bénévoles du Fonds préparent des rapports sur les incidents violents ou racistes dans les stades, en se basant sur des critères clairement déterminés. Le Fonds publie ensuite une échelle hebdomadaire mesurant la violence et le racisme.

    L'équipe de Betar Jérusalem est venue en tête pour la saison 2003-2004, avec 21,24 points sur l'échelle du racisme et de la violence. Elle est suivie de peu par Maccabi Tel-Aviv, qui a marqué 19,62 points. En troisième place, vient l'équipe d'Hapoel Tel-Aviv avec 15,3 points. [...]

    Les principaux événements condamnables de la saison 2003-2004 :

    - Sixième semaine : Les supporters de Betar Jérusalem ont scandé des slogans et des chants incitant à la haine raciale, tout au long du match de leur équipe avec Ekhwan al-Nasra. Par exemple : " Nous allons brûler al-Nasra et en jouir ", " Je jure au nom de Dieu qu'il ne restera plus d'Arabes ", " Le juif est un esprit, l'Arabe un fils de pute ", Ekhwan al-Nasra sont des terrroristes, et je déteste tous les Arabes ", " Mort aux Arabes "… Si un joueur d'Ekhwan al-Nasra faisait une chute, les supporters de Betar Jérusalem hurlaient en chœur : " terroriste, terroriste, terroriste ". Ils ont injurié Oren Nassim et Alon Mezrahi, les joueurs juifs d'Ekhwan al-Nasra, leur lançant : " Terroristes, vous êtes devenus musulmans ". A la fin du match, les supporters de Betar Jérusalem se sont rassemblés à l'extérieur du stade et ont continué à lancer des jurons, mais d'importantes mesures de sécurité ont évité toute violence physique.

    Les supporters de Maccabi Tel-Aviv ont injurié les joueurs arabes d'Abnaa Sakhnein, en les appelant " martyrs " et " terroristes ". Ils ont scandé " Mort aux Arabes ". Ils ont également injurié Lenor Assouline, le joueur juif d'Abnaa Sakhnein, le qualifiant d' " anti-juif ". Ils ont par ailleurs injurié le joueur éthiopien de leur propre équipe, Baruch Dago, le traitant de " noir " et criant " Rentre en Ethiopie ".

    Neuvième semaine : Le supporters d'Hapoel Tel-Aviv ont scandé des insultes contre les supporters de Maccabi Tel-Aviv, comme " Néo-nazis ", " Pourvu que Maccabi connaisse la catastrophe ", " Que les joueurs du Maccabi soient brûlés vifs ", " Que les supporters du Maccabi meurent aujourd'hui même ", etc. Après le match, l'administration, l'entraîneur et les joueurs du Maccabi ont été sauvagement agressés, aussi bien verbalement que physiquement.

    Quatorzième semaine : Les supporters de Betar Jérusalem ont hué, tout au long du match, les joueurs noirs d'Hapoel Tel-Aviv.

    Vingt-deuxième semaine : Les supporters de Betar Jérusalem ont scandé des mots d'ordre racistes contre les supporters et les joueurs d'Abnaa Sakhnein, comme " Mort aux Arabes ", " Je hais les Arabes, je hais les cousins ", " Je hais l'islam ", " Hezbollah ", " Pourvu que votre village brûle", " Arabes à vendre ". Ils ont également insulté le prophète de l'islam Mahomet.

    Vingt-quatrième semaine : Lors d'une cérémonie précédant un match, les supporters de Maccabi Tel-Aviv ont hué le joueur Adham Shebeita, scandant : " Que son visage soit brûlé ! " et " A genoux, Adham Shebaita ! ".

    Trentième semaine : Les supporters de Beni Yehuda ont scandé tout au long du match : " Mort aux Arabes " et " Salim Tameh, saboteur ! "
    (www.aad-online.org/2004/Fresnchsite/Frenchlinks/aad4/34/2.htm)
  • Racisme licite (26 September 2006, par Ehud Loten)

    Il a été question cette semaine de l’annulation de la visite du talentueux attaquant congolais Mohammed Chita, au club du Betar Jérusalem. Cette annulation soudaine a suscité l’étonnement parce que le joueur se trouvait bien à Jérusalem et il ne manquait plus que l’annulation des négociations entre le Betar et son club belge Standard Liège.

    Tous ceux qui ont suivi la " signature " de Chita avec le Betar ont pu remarquer sans difficulté le racisme des supporters de cette équipe. Car pour le plus grand malheur de Chita, son prénom est Mohammed, ce qui a déchaîné la colère des auteurs de commentaires parmi les supporters du Betar, étant donné le lien entre le joueur et la religion musulmane. Et ce qui a été dit sur son grand talent n’a pas convaincu la plupart d’entre eux.
    Mais si nous nous étions habitués (malheureusement) au racisme honteux des supporters du Betar, cet incident a dépassé les bornes. Car le racisme ici avait l’aval de l’administration du Betar qui se pique toujours d’être un club sérieux et organisé – comme en Europe.

    Comment en suis-je arrivé à ces conclusions ? Sur tous les sites électroniques et dans tous les articles de presse, une main cachée est soucieuse d’indiquer que " bien que son nom soit Mohammed, c’est un joueur chrétien ". Et la question (qui est pourtant, je l’admets, moins importante que ce qu’a dit Materazzi à Zidane) est : qui est celui qui s’est ingénié à affirmer à chaque fois aux journalistes qu’il s’agissait d’un joueur chrétien ?

    Et la réponse est : l’administration du Betar, naturellement. Je pense que celle-ci a eu peur des réactions des supporters en colère et qu’elle a été soucieuse de faire publier de temps à autre cette information mensongère sur la religion du joueur à l’occasion de toutes les mentions de sa signature du contrat. C’est vraiment une administration dont on peut être fiers. Et je suis étonné également de voir la naïveté des journalistes bernés qui ont cru que quelqu’un s’appelant Mohammed pouvait être chrétien.

    Le mensonge de l’administration du Betar s’est révélé aux yeux de tous. Car le joueur est musulman et il ressort de ce qui a été publié par la suite que Chita ne rejoindra pas le Betar, suivant en cela les conseils de son chargé d’affaires, de crainte d’avoir à affronter le racisme des supporters de l’équipe. Et il me reste à me demander ce que pensaient les responsables du Betar lorsqu’ils ont menti ouvertement sur la religion du joueur. Allait-il confirmer leur mensonge en allant prier à l’église tous les dimanches ? Et en faisant le signe de croix après chaque but marqué ?
    (www.nrg.co.il)
  • Racism in Israeli Football (6 April 2005, by Avraham Oz)

    Following some of my updates, some friends send me messages reminding me the worrying phenomena of growing anti-semitism in today's world. It is worrying indeed, even beyond the erroneous identification made between anti-Israeli policies, or even anti-Zionism, and anti-Semitism. Imagine a crowd somewhere in a European football stadium, shouting anti-semitic slogans, waving flags of hatred, and cursing a Jewish player, or an Israeli team. Imagine the waves of protest, from Jewish circles over the world and official protest from Israel.

    Well, in my country, in my town, last night, such scenes of hatred were seen big time: scenes which would not have put to shame the most radical assemblies of Neo-Nazis and other racist groups. Except that the targeted group was not Jewish, but Arab. The fans of Israeli football club Betar Jerusalem are known for their lively conduct during games and around them. Scenes of violence frequently occur when they have grievances against the score of their team every day of the year. Now imagine what happens when a league game against one of the two Arab clubs – Sakhnin and Nazareth – in the Israeli Premier League take place.

    Last week the national team had two important games here in Israel against two of its international rivals at group 4 of the world cup 2006 qualifying games: Ireland and France. Both teams were considered to have advantage over the Israeli team, and the two draws were considered a fair achievement for the Israeli team. The goal which brought the Israeli team the draw against Ireland was scored by Arab Sakhnin player Abbas Suan; against France, the other Israeli Arab player in the national team, Walid Badir, headed a late equaliser to grab a point just seven minutes from time and got Israel the coveted draw.

    Last night, in Tel Aviv, in the same stadium where those two international games last week took place, at the scheduled league meeting between Betar Jerusalem and Suan's club, Sakhnin, Suan was supposed to be received by everyone as the star of the national team. The organizers, from the hosting Betar club, wasted no effort in trying to impose a sporting nature on the charged clash, with the announcer congratulating, "in the name of the tens of thousands of Betar supporters," Israeli international Abbas Suan for his equalizer against Ireland slightly more than a week ago. "Welcome him," enthused the announcer, but the applause was drowned out by a huge chorus of boos from the Betar stands. Suan may be a national team star; but in Jerusalem, he is just another Arab soccer player. The score this season between the two clubs, both currently struggling at the bottom of the league, is in favour of the Arab team. It's bad enough for a Jewish club to beat the most patriotic team that represents the eternal capital of the state; but for an Arab club to do so twice in a single season is just too much. At least 400 among the 5000 Betar supporters were shouting: "Let the town of Sakhnin be burnt down," "We hate all Arabs," and worse; to the cameras of the various Israeli TV channels, Betar fans shouted: "we'd rather lose 0:10 to Ireland rather than have an Arab score a goal in our name! He doesn't represent us!"

    Some apologetics were sounded in talk shows this morning. We are asked to understand football hooliganism is a known phenomena. 400, said one Betar supporter on TV this morning, are less than 10 percent. I am not sure such arguments would have satisfied Jewish protests against anti-semitic riots elsewhere. Yet just as we are asked to regard anti-semitism as a unique form of racism, so we should pay attention to growing Israeli xenophobia and particularly to Arab-hatred against the Jewish population. It becomes a growing phenomenon not to be underestimated. Violence grows among youth; people are stabbed to death during daily raws over a parking space or the behaviour of neighbour's dogs. Yesterday a teenager who came to Israel from France two years ago was hospitalized after being battered by her classmates, boys and girls, following a raw over a cellphone. She told TV interviewer she was considering going back to France: "there is prominent anti-semitism growing there," she said, "But at least I wasn't battered like this."

    The sport portfolio in the Israeli government is placed in the hands of famous Mini-Stress of Education and Culture Limor Livnat, who has recently ordered the "legacy of [assassinated Israeli Minister of Tourism] Rehav'am Zeevi," who founded his radical nationalistic party on a platform of "transfer" (in plain terms "ethnic cleansing") of the Arab population of Israel, to be part of the official school curriculum. Stand-up comedians on stage and TV in Israel are still ridiculing her enthusiastic jump -to the point of harassment – all over Israeli sportsmen who gained medals for Israel in the recent Athens Olympic games. What, would you think, did she have to say about last night's riots against Arabs? You have guessed right. Nothing. She, like all her other fellow Ministers, suddenly lost their voice. Small wonder: they must save it for crying their protest against the next anti-semitic incident somewhere in the world...
    (http://cosmos.ucc.ie/cs1064/jabowen/IPSC/articles/article0016376.txt)
  • Le football rongé par le racisme en Israel (22 janvier 2004)

    En scandant " Mort aux Arabes ", des centaines de jeunes supporters de foot Juifs foncèrent dans une rue poussiéreuse à l’écart, pour intercepter un bus transportant des fans du club arabe qui venait juste de battre les leurs lors d’un match disputé. Les supporters les conspuèrent même après le départ du bus. Juste avant, un supporter arabe venait d’être frappé d’une pierre à la tête, le front ensanglanté.

    Bienvenue au football professionnel en Israël, où racisme et violence font partie du sport le plus populaire du pays.
    Avant le match de lundi, l’équipe d’accueil, Bnei Yehuda du quartier ouvrier Hatikya de Tel Aviv, s’était vu attribuer une plaque comme équipe la plus tolérante et la plus fair-play par le New Israel Fund, qui a suivi le comportement des supporters de foot à l’aide d’une nouvelle échelle du racisme. " Aujourd’hui, ils ont reçu un prix, et puis ça arrive parce qu’ils ont perdu un match ", dit Nur Ghentos, capitaine de l’équipe arabe victorieuse, Bnei Sakhnin, en regardant les infirmiers bander la tête du jeune touché d’une pierre. " On dirait que tant que vous gagnez, vous êtes tolérant, mais voici le résultat quand vous perdez. C’est l’histoire du foot en Israël ".

    Avant cette saison, les supporters de Bnei Yehuda avaient la réputation d’être chahuteurs et racistes. L’équipe avait été en tête de 1ere division d’Israël jusqu’à lundi – et pour certains supporters Juifs, perdre devant une équipe arabe, c’est l’insulte suprême. Immédiatement après le match, les supporters se retinrent, applaudissant même brièvement l’équipe adverse. Les membres du New Israel Fund ont noté que les problèmes commencèrent, comme souvent, hors du stade. Le hooliganisme israélien n’a pas atteint les sommets européens, mais c’est une partie intégrante de la culture du jeu ici, une chose que les organisations de la société civile et les responsables des équipes essaient de changer.

    Depuis la dernière saison, l’indice du racisme du New Israel Fund a donné une note hebdomadaire aux supporters de chaque équipe. Des volontaires se tiennent comme enquêteurs dans les foules et notent le nombre de chants, de slogans et d’incidents racistes qu’ils observent. Les résultats, de l’équipe la plus à la moins tolérante, sont publiés chaque semaine dans les médias et ont fait du bruit parmi les supporters du football.

    Dans l’ensemble, les incidents racistes ont baissé dans les matchs cette saison, mais la violence Israélo-Palestinienne exacerbe la violence au foot, dit Yair Galily, un sociologue du sport qui dirige les études des mass médias et du sport au Zinman College de l’Institut Wingate d’Israël.
    Le football " est un reflet très intéressant et authentique de la société. Nous avons une société violente par rapport à d’autres endroits au monde, et nous pouvons le voir dans la violence au foot ", dit Galily. " C’est légitimisé quand ça vient dans le cadre du football, comme si ç’était bien de sortir ça sous forme d’une catharsis ".

    Lior Asulin, un joueur juif, a marqué le but de la victoire pour l’équipe arabe, Bnei Sakhnin. Il a été acclamé et hissé sur les épaules de ses coéquipiers tandis que les supporters criaient leur joie. Le racisme dans le football israélien vient surtout des supporters Juifs, qui s’imaginent qu’ils peuvent crier des slogans comme " Mort aux Arabes " ou " Allez en Palestine " sans craindre de conséquences, d’après les experts. On ne peut pas en dire autant de leurs homologues Arabes. Les Juifs qui jouent dans les équipes arabes disent qu’ils se sentent à l’aise dans leurs équipes.
    Les supporters Arabes " nous respectent beaucoup, il n’y a pas de racisme. Ils nous traitent bien et nous apprécions chaque moment ", disait Asulin, souriant, tandis qu’un flot continu de supporters venait lui donner une tape dans le dos après le match.

    A la fin des années 70, les premiers joueurs Arabes ont été inclus dans des équipes juives de première division. Cette année, pour la première fois, deux équipes arabes, Bnei Sakhnin et Maccabi Ahi Nazareth, ont été assez bonnes pour jouer en première division. Signe de la possibilité pour le foot de devenir un symbole de coexistence, les fans de l’équipe de Nazareth applaudirent quand Chaim Revivo, la star du foot israélien, apparut sur le terrain, pour jouer avec l’équipe juive d’Ashdod. En échange, les fans d’Ashdod applaudirent les supporters de Nazareth. L’an dernier, une équipe de la ville arabe de Kafr Kana fut invitée à jouer un match en Jordanie, mais les Jordaniens lui dirent qu’elle devait venir sans ses joueurs Juifs. La direction de Kafr Kana refusa d’aller sans ses joueurs Juifs.

    Les sponsors peuvent aussi éviter les équipes réputées pour leur racisme. La compagnie de téléphone Cellcom a abandonné son soutien à Beitar Jerusalem, qui a les supporters les plus racistes du pays. On sait que ses supporters ont scandé " Mort aux Arabes " pendant des matchs entiers, et l’équipe est la seule en première division à n’avoir jamais pris de joueur arabe. Les responsables du club ont nié tout lien entre la décision de Cellcom et le comportement des supporters.

    On a su que lors des matchs de Beitar Jerusalem, des feuilles ont été distribuées avec des paroles racistes mises sur un air populaire. La chanson visait un des meilleurs joueurs arabes d’Israël, Salim Toameh, qui joue pour Hapoel Tel Aviv. On entend maintenant couramment la chanson contre les joueurs arabes lors des matchs joués dans le pays, que Toameh y joue ou non.

    D’après l’indice du New Israel Fund, les supporteurs de Beitar Jerusalem se classent parmi les plus racistes. Le porte-parole de Beitar Jerusalem, Lior Mai, a parlé de l’indice, en disant qu’il incitait les supporters à gagner la première place – même la première place comme racistes.

    Le racisme au foot ne se limite pas à la scène arabo-juive. Les joueurs noirs – Juifs Ethiopiens et joueurs étrangers d’Afrique – ont été raillés de cris comme " Sale noir " ou " Retourne à ta jungle ". Baruch Dago, un joueur Juif Ethiopien du Maccabi Tel Aviv, envisagerait de quitter l’équipe parce qu’il est trop abattu par insultes racistes que lui lancent les supporters de sa propre équipe.

    Le sentiment anti-noir est particulièrement répandu dans le football européen, et des campagnes de sensibilisation essaient de le combattre. Des épithètes antisémites sont parfois lancées sur des joueurs d’équipes britanniques ou hollandaises considérées comme " équipes juives " parce qu’elles appartiennent à des juifs ou bien qu’elles ont été traditionnellement soutenues par des supporters Juifs.

    Dans les rues délabrées du quartier Hatikya, Bnei Yahuda est roi. Un jeune supporter, Ben Ezra, 17 ans, reprenant son souffle d’avoir couru après le bus de Bnei Sakhnin, tenta de minimiser le racisme de ses amis. " Dans le quartier Hatikva, il n’y a qu’une chose dont on est fiers : Bnei Yehuda. Ca n’a rien de personnel entre Juifs et Arabes ". Mais son ami Lior Mizrani, aussi 17 ans, dit que les insultes racistes sont une partie de la tension générale. " On dit ces choses là par haine ", dit-il. " Ca vient de toutes les attaques terroristes et ça finit ici, sur le terrain de foot ".
    (http://www.kickitout.org/index.php?id=9&StoryID=2188, www.toulouse-palestine.org/doc/bulletin/040215.html#14)
Toujours est-il que ce soir-là, alors que les supporters du PSG étaient fouillés à l'entrée du Parc des Princes, ceux du Hapoël Tel Aviv ne l'étaient pas... Alors, au témoignage d'un spectateur : "Au coup d'envoi, les fans de l'Hapoël placés en tribune visiteur, n'ayant pas subi de fouilles, se déchaînent. Une vingtaine de fumigènes sont allumés et lancés sur les stewards et CRS présents sur la pelouse. L'un des fumigènes est balancé sur la tribune Auteuil. Avant même que le PSG encaisse le premier but, les échauffourrés commencent.  Les stewards débordés doivent se positionner entre la tribune Auteuil et la  tribune visiteur..." (http://sefairefoot.canalblog.com) - ces fumigènes qui valent à n'importe quel supporter du PSG d'être placé en garde à vue, interdit de stade et condamné au pénal... Car "l'introduction de fumigènes dans une enceinte sportive" ou leur utilisation est un délit passible de 15 000 euros d’amende et de 3 ans d’emprisonnement.

  • "[...] j'étais au Parc hier et il est évident que, dès le début, il y avait quelque chose qui clochait. Nous avons pu passer devant la tribune visiteurs sans aucune fouille, sans montrer aucun billet ou carte. Louche, un peu comme contre Derry d'ailleurs. Mais si les Irlandais et les Parisiens faisaient amis-amis, là ce n'était pas vraiment le cas. Autre différence, les "sympathisants" de l'Hapoel étaient très très nombreux, 10.000 sans doute.

    Si l'on met de côté la folie furieuse du carré visiteurs, les latérales du Parc étaient remplies de supporters de l'Hapoel, sortant des drapeaux israéliens...Le KOB répondait en sortant leurs traditionnels Marseillaise et drapeaux français...On se serait cru en octobre 93 lors de ce fameux France-Israël... Etonnant d'ailleurs de noter la similitude entre les 2 naufrages tricolores...

    Tout ça pour dire que les supps israéliens étaient déchâinés et prenaient le Parc pour terrain conquis (beaucoup plus que les Marseillais quand ils montent à Paris...ou à Saint-Denis)... Sans expliquer ce qui allait suivre, tout cela nourrissait le malaise ambiant..."

Un autre témoignage nous restitue l'ambiance du match dans les tribunes :
  • "Etant présent en Auteuil Rouge puis Bleu [deux zones différentes de la tribune "Auteuil"] durant le match, je tiens à livrer un compte-rendu de l'atmosphere particulièrement haineuse qui régnait lors de ce match. Déjà avant le match, on m'avait prévenu qu'il y aurait de nombreux juifs de la capitale qui viendraient pour supporter une équipe israélienne. En arrivant aux abords du parc, puis en entrant dans le stade, je fus vraiment surpris de leur nombre. Je ne m'attendais pas qu'ils soient nombreux à ce point .
    Très rapidement, à Auteuil, le "match des supporters" vire dans le conflit au Proche-Orient. Je m'explique : drapeaux libanais et palestiniens de sortie d'un coté, drapeaux israéliens de l'autre, les insultes fusent des 2 cotés... Déjà on ressent dans l'atmosphere que ce sera pas un match comme les autres...
    Le PSG est "dans un grand soir" et se prend 2 buts d'entrée. Quasiment la moitiée du parc (presidentielle + tribune Paris) se lève et exulte : on se croirait a l'extérieur. Les juifs ont une grande gueule et, croyez-moi, ils savent s'en servir !!! A CE MOMENT LA JE SENS QUE ÇA VA MAL SE FINIR car le fait de se faire torcher au parc par une équipe de merde comme l'Hapoel Tel Aviv + voir tous les juifs nous chambrer cela fait un cocktail détonnant...
    Le psg revient au score dans une ambiance chaotique !! Tout le monde sur l'égalisation veut aller sur la grille qui nous sépare du secteur visiteur, mais la ligne de stadiers parvient à grand peine à nous stopper.
    Le Psg se prend encore un but et là explosion encore de LA MOITIE OU PRESQUE DU PARC.
    Peu avant la mi-temps je monte en bleu rejoindre un pote qui est dans le secteur LF. Durant la pause les insultes ne s'arrêtent pas. Quelques KSD se rapprochent du parcage pour une mini charge rapidement bloquée par une marée de stadiers. Les juifs nous insultent avec des slogans anti-France, anti-musulmans, anti-parisiens nous répliquons avec des slogans anti-sionistes et anti-sémites (tout ça pour bien faire comprendre que le racisme n'était pas que du coté parisien jeudi soir).
    Le PSG s'incline HONTEUSEMENT 4 buts à deux dans un stade maintenant en délire et un silence de mort coté parisien. Les juifs chantent "Paris on t'encule" "et ils sont où les parisiens" [cette dernière formule est bien sûr à double entente et dans le contexte c'est clairement un appel à la bagarre], mais déjà je sens que beaucoup n'attendent que le coup de sifflet final pour aller voir de plus près si ils ont une si grande gueule dehors.
    FIN du match. Les baches ont été rangées depuis un moment. Tout le monde sort rapidement. A ce moment là je reconnais que j'avais trop la haine et je ne voulais que une seule chose c'était casser du juif (mais je précise que même si la phrase semble choquante et raciste je l'assume pleinement mais je sais pas comment expliquer que si ça aurait été des lensois, des bordelais ou des martiens, j'aurais eu la même réaction). Maintenant je réalise combien c'est très con cette haine.
    La haine d'avoir des joueurs de merde.
    La haine de savoir que on va encore passer pour des clowns en france et en europe
    La haine des mauvais résultats qui s enchaînent depuis des années.
    La haine de voir NOTRE STADE EN GRANDE PARTI ACQUIS A L'HAPOEL TEL AVIV" [...]
    [j'ai un peu modifié l'orthographe, trop "Education nationale" à mon goût...]
    (www.pariscasuals.com/html/accueil.php)
A suivre...
Votre héros est un malade mental
L'affaire Granomort : un simple fait-divers ?


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1 décembre 2006 5 01 /12 /décembre /2006 23:58

Jeudi 23 novembre 2006. Il est 23h passées. Place de la Porte de Saint-Cloud, non loin du Parc des Princes, sur le trottoir de Paris, un jeune homme agonise. Il se nomme Julien Quemener. Il n'a que 25 ans. Il vient de prendre une balle en plein cœur.

Portrait en guise de requiem

Tranquille, amical, serviable et travailleur, Julien est un jeune homme sans histoires. Originaire de Dinard en Bretagne par ses grands-parents paternels, il vit en banlieue sud, à Savigny-sur-Orge, avec son père menuisier, sa mère, employée à la fac d'Orsay, son jeune frère et une cousine de Marseille. Il aime la voile et le foot, mais surtout depuis quatre ans il est amoureux d'Emilie, une frêle eurasienne de 19 ans. Ils ont prévu de s'installer ensemble dans un petit appartement que le père de Julien finit de retaper pour eux. Une vie simple.

Depuis tout petit, comme Antoine, son ami d'enfance, le jeune homme est fan du PSG : "On voulait supporter le PSG, mais on ne savait pas dans quelle tribune, Auteuil ou Boulogne ? dira Antoine à des journalistes de Paris Match [n° 3002, 29 novembre 2006]. On a finalement choisi Boulogne pour l'ambiance festive. Et pour rien d'autre. Cornes de brume, écharpes, maquillages, drapeaux... Il n'y a qu'à venir au Parc pour voir que c'est là où l'on s'amuse le plus et où l'on chante le plus fort".

Mais voilà, la tribune Boulogne du Parc des Princes, c'est ça :

Hooligans du KOB au Parc des Princes

Vous aurez remarqué les couleurs bleu-blanc-rouge qui montrent bien que ces hooligans sont de dangereux nationalistes... très différents des supporters "normaux" comme ceux-ci qu'on nous montrait il y a quelques mois :

Supporters français lors de la Coupe du Monde 2006

Et, bien entendu, ceci...
Supporters du PSG (racistes)

...n'a rien à voir avec cela :
Scène de liesse après une victoire des Bleus
 lors de la Coupe du Monde (Montpellier, juin 2006)

Julien ne faisait pas de politique. Il n'avait jamais voté et n'avait d'ailleurs même pas de carte d'électeur. Il n'était pas un délinquant. Il n'était pas non plus un extrémiste, de quelque espèce que ce soit. Encore moins un "fasciste". Pourtant le soir du drame, il est à peine mort que la curée commence...

Paroles de haine

Pour la classe politique, les principaux médias, les hautes autorités de l'administration et les associations officielles, le scandale du 23 novembre Porte de Saint-Cloud, ce n'est pas la mort d'un gentil jeune homme de 25 ans. Non, le scandale, la tragédie, ce sont les propos racistes attribués aux supporteurs du PSG. Qu'on en juge par les extraits qui suivent (empruntés au site du Nouvel Observateur), ad nauseam :
  • "Cet événement m'inspire un sentiment non seulement de condamnation, non seulement de stupéfaction mais aussi d'horreur. Ces violences sont scandaleuses, les propos racistes, quelle que soit leur nature sont honteux et indignes et doivent être condamnés, et bien entendu je les condamne avec la plus grande fermeté." (Jacques Chirac, président de la République française, 24 novembre 2006)
  • "C'est un drame qui montre à quel point ces violences sont inacceptables. Nous nous sommes mobilisés au fil des dernières années avec Nicolas Sarkozy pour apporter les justes réponses et en particulier permettre des actions préventives d'interdiction de stades. Nous le voyons, il faut prendre des dispositions nouvelles. Il faut s'assurer que la répression pour tous ceux qui usent des violences dans les stades soit exemplaire." (Dominique de Villepin, premier ministre, 24 novembre 2006)
  • "Ces tensions et ces violences dont les conséquences peuvent être dramatiques, à l'image de ce qui s'est produit hier soir à l'occasion du match PSG - Hapoël Tel-Aviv, sont inacceptables et ternissent l'image du sport". (Jean-François Lamour, ministre de la jeunesse et des sports, 24 novembre 2006)
  • "Je crois qu'il y a une solution radicale et efficace, qui est de fermer les tribunes où se passent les phénomènes de violences. Sans doute ce n'est pas fait pour des problèmes financiers, mais lorsqu'on met en face à face les recettes contre ce qui se passe, je pense qu'aujourd'hui il faut arrêter de lésiner et il faut fermer les tribunes où se passent ce type de violence. C'est quand même incroyable ce fonctionnement de l'ordre public, qui sait parfaitement lorsque les supporters entrent dans les stades ce qui va se passer, et qui laisse entrer ces supporters. Il faut que le club prenne ses responsabilités, qu'il ferme les tribunes où se passent ces déclenchements insupportables de violence, de racisme et d'antisémitisme." (Ségolène Royal, candidate du Parti Socialiste à la présidence de la République, 25 novembre 2006)
  • "En tout état de cause la gravité de cet évènement vient de confirmer la nécessité absolue de combattre le racisme et l'antisémitisme dans l'environnement des supporters du PSG". "J'entends que désormais l'image et les valeurs de Paris soient respectées en toute circonstances : elles ne peuvent s'accommoder de la moindre forme d'intolérance. C'est pourquoi des actes significatifs doivent être posés". (Bertrand Delanoë, maire de Paris, 24 novembre 2006)
  • "Les bandes de voyous qui se nomment supporteurs ne doivent plus avoir leur place dans l'enceinte du Parc des Princes et ailleurs". "Ces manifestations de violence inqualifiables et sans doute teintées de racisme doivent être sanctionnées avec la plus grande fermeté". (Claude Goasguen, député UMP du XVI arrondissement de Paris, 24 novembre 2006)
  • "Il faut nettoyer la tribune Boulogne. Je pense que les dirigeants du Paris Saint-Germain doivent réfléchir à la question de savoir s'il ne faut pas maintenant faire venir à la tribune Boulogne un public qui correspond à ce qu'est le reste du public au Parc des princes, qui n'est pas raciste et qui n'est pas violent. Je pense que le PSG doit se poser la question dans un premier de temps de savoir s'il ne faut pas d'ici le reste de la saison jouer devant la tribune Boulogne vide. Et à ce moment il faut qu'il y ait le concours des forces de l'ordre parce que ce sera un bras de fer." (Pascal Cherki, adjoint au maire de Paris, chargé des sports, 25 novembre 2006 sur RTL)
  • "Ces ultra-violents, on les connaît. Ils sont tous répertoriés et pourtant, ils continuent à aller au stade." "Le ministre de l'Intérieur doit arrêter de brasser du vent. Nous demandons que les gens classés en catégorie C soient interdits définitivement de stade. Ceux classés en catégorie B doivent se voir interdire de stade à titre temporaire." (Didier Bariani, président du groupe UDF au Conseil de Paris)
  • "C'est une agression à caractère antisémite, c'est vraiment ça venant du Kop Boulogne, c'est toujours ça". "A l'issue du match, au moment de la dispersion des supporteurs, il y [avait] à peu près 200 supporteurs du Kop Boulogne du PSG". "Ce sont des gens extrêmement violents, extrêmement dangereux, animés par une idéologie d'extrême droite". (un porte-parole du syndicat Synergie-officiers, 24 novembre 2006 sur RTL)
  • "Je déplore qu'il y ait eu un mort du côté des supporters du PSG, mais ce sont quand même des gens qui sont racistes". "Il faut quand même savoir que le 'kop' de Boulogne [...] c'est à peu près 150 personnes [...], des sauvages, des voyous". (Joaquim Masanet, secrétaire général de l'UNSA-police, 24 novembre 2006, sur France Info)
  • "Tout ça est terrible. Dans cette affaire, le racisme et l'antisémitisme se mélangent comme d'habitude, […] c'est la violence banale, banalisée. Toute la société doit se mobiliser, les parents, les enseignants, tout le monde, pour qu'on apprenne à vivre ensemble en France. Ce qui se passe est grave pour la société française." (Roger Cukierman, président du Conseil représentatif des institutions juives de France - CRIF, 24 novembre 2006)
  • Et la Ligue internationale contre le racisme et l'antisémitisme - LICRA "constate, depuis le début de la saison, un réel durcissement des agressions racistes au Paris SG, dans des circonstances de plus en plus violentes", et "condamne avec fermeté" les violences survenues jeudi soir. Elle rappelle qu'elle "dénonce, et ce depuis plusieurs années, le climat d'insécurité et de terreur (violences racistes et antisémites, ratonnades, lynchages) qui règne à chaque match dans les allées du Parc des Princes". (24 novembre 2006)
  • "Un mort à la fin d'un match: ça devait arriver. Ce qu'il s'est passé est extrêmement grave et résulte d'un climat de violence et de racisme présent dans et autour de trop nombreux stades. Cet état de violence est dénoncé depuis plusieurs années par tous ceux qui aiment le football..." (SOS-Racisme, 24 novembre 2006)
  • "Ces faits inacceptables, même s'ils émanent d'une minorité, prouvent malheureusement que les actions déjà mises en œuvre par la Fédération française de football et la Ligue de football professionnel, en liaison avec les pouvoirs publics, pour lutter contre la violence et le racisme doivent être poursuivies et intensifiées pour éradiquer ce fléau qui détruit les valeurs du sport". (Jean-Pierre Escalettes, président de la Fédération française de football, 24 novembre 2006)
Personne ne savait encore ce qui s'était exactement passé ce soir-là, si ce n'est qu'un jeune homme encore inconnu de tous était mort. Mais des déclarations unanimes complaisamment diffusées dans la presse, il ressortait bien que Julien Quemener ne pouvait être qu'un sale raciste. Qu'il crève ! Un seul montrera un peu d'humanité pour la famille du jeune homme, Alain Cayzac, président du club Paris Saint-Germain : "C'est un événement dramatique. Avant d'être président, j'ai été dirigeant historique et je suis bouleversé car c'est la première fois dans l'histoire du club qu'il y a un mort. Tout le reste est secondaire par rapport à ce drame. [...] le reste ne sont que des mots." Mais pour avoir fait part de "sa profonde compassion à la famille du supporteur décédé", il sera aussitôt dénoncé par SOS-Racisme et l'Union des étudiants juifs de France !

Le dimanche 26 novembre, le PSG était en déplacement à Nantes pour son premier match après le drame. Ces supporters, que l'on présente comme des brutes épaisses, surent se montrer bien plus dignes que beaucoup de nos messieurs les importants. Ils avaient souhaité, en accord avec les dirigeants du club, que soit observée avant la rencontre une minute de silence en mémoire de Julien. C'était la moindre des choses. La Ligue de football y opposa un refus catégorique. Solidaires des parisiens, les supporters nantais avaient apporté une gerbe de fleurs pour la déposer sur la pelouse du stade. Le préfet s'y opposa !

Que s'était-il donc passé le soir du 23 novembre pour que l'on insulte aussi ouvertement la mémoire d'un mort ?

A suivre...
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24 novembre 2006 5 24 /11 /novembre /2006 23:17
La guerre est lointaine quand on ne la subit pas. Le 9 octobre dernier, après des semaines sans nouvelles, j'ai reçu la lettre qui suit d'une amie libanaise. Soudain, un choc. En peu de mots, avec pudeur, elle dit beaucoup...

"Chère Mélusine,

Vous m'excuserez pour ce retard à vous écrire mais nous avons passé par des moments très difficiles et je n'avais pas l'esprit à écrire. Malheureusement, j'ai perdu beaucoup d'amis dans cette guerre infernale, et maintenant je reprend ma vie normale. Toute la famille va bien grâce à Dieu, mais c'était très dur. Même deux mois après, les routes et les immeubles en ruines nous entourent comme un cauchemar. Je ne sais pas quoi vous dire, je suis toujours sous le choc, car le Liban est vraiment détruit que ce soit la pierre, les gens ou l'économie, et les gens sont inquiets car on parle ici d'une nouvelle guerre qui sera plus féroce que la dernière. Bizarrement les Libanais croient toujours que, un jour, nous vivrons comme tous les peuples en paix. Merci à vous tous qui avez pensé à nous. Vous me manquez beaucoup.
Nada"
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29 octobre 2006 7 29 /10 /octobre /2006 00:22
Fin octobre 1956, après plusieurs mois d'espoir, commençait l'écrasement par l'armée rouge du soulèvement de Budapest contre le totalitarisme soviétique. La répression fera des milliers de morts et environ 200.000 Hongrois seront contraints de fuir leur pays.

Budapest, 1956 : De jeunes Hongrois s'emparent d'un char soviétique

Budapest, 1956

Hiver 1956-1957 : réfugiés hongrois passant la frontière autrichienne

En cette année 2006 de cinquantenaire, plusieurs commémorations ont eu lieu, notamment le 22 juin dans la capitale hongroise en présence du président des USA. Mais il semble que le rappel de ces événements tragiques, qui révélèrent à beaucoup la sombre réalité du communisme, ne soit pas du goût de tout le monde en France. Le Ministère de l'Intérieur a en effet interdit hier 28 octobre à la dernière minute et sans raison sérieuse ("risques de trouble à l'ordre public" !) une petite manifestation qui devait se tenir à Paris en leur mémoire... La chose est d'autant plus curieuse que M. Sarközy en tant que Hongrois lui-même ne peut quand même pas ignorer ce qui s'est passé à Budapest en 1956. Ses compatriotes apprécieront. Pour rafraîchir la mémoire de nos hommes politiques, voici ce qu'écrivait Albert Camus en 1957 :


LE SANG DES HONGROIS

Je ne suis pas de ceux qui souhaitent que le peuple hongrois prenne à nouveau les armes dans une insurrection vouée à l’écrasement, sous les yeux d’une société internationale qui ne lui ménagera ni applaudissements, ni larmes vertueuses, mais qui retournera ensuite à ses pantoufles comme font les sportifs de gradins, le dimanche soir, après un match de coupe.

Il y a déjà trop de morts dans le stade et nous ne pouvons être généreux que de notre propre sang. Le sang hongrois s’est révélé trop précieux à l’Europe et à la liberté pour que nous n’en soyons pas avares jusqu’à la moindre goutte.

Mais je ne suis pas de ceux qui pensent qu’il peut y avoir un accommodement, même résigné, même provisoire, avec un régime de terreur qui a autant de droit à s’appeler socialiste que les bourreaux de l’Inquisition en avaient à s’appeler chrétiens.

Et, dans ce jour anniversaire de la liberté, je souhaite de toutes mes forces que la résistance muette du peuple hongrois se maintienne, se renforce, et répercutée par toutes les voix que nous pourrons lui donner, obtienne de l’opinion internationale unanime le boycott de ses oppresseurs.

Et si cette opinion est trop veule ou égoiste pour rendre justice à un peuple martyr, si nos voix aussi sont trop faibles, je souhaite que la résistance hongroise se maintienne encore jusqu’à ce que l’Etat contre-révolutionnaire s’ècroule partout à l’est sous le poids de ses mensonges et de ses contradictions.

La Hongrie vaincue et enchaînée a plus fait pour la liberté et la justice qu’aucun peuple depuis vingt ans. Mais, pour que cette leçon atteigne et persuade en Occident ceux qui se bouchaient les oreilles et les yeux, il a fallu et nous ne pourrons nous en consoler, que le peuple hongrois versât à flots un sang qui sèche déjà dans les mémoires.

Dans la solitude où se trouve aujourd’hui l’Europe, nous n’avons qu’un moyen (d'être fidèles à la Hongrie), et qui est de ne jamais trahir, chez nous et ailleurs, ce pour quoi les combattants hongrois sont morts, de ne jamais justifier, chez nous et ailleurs, fût-ce indirectement, ce qui les a tués.

Nous aurons bien du mal à être dignes de tant de sacrifices. Mais nous devons nous y essayer, dans une Europe enfin unie, en oubliant nos querelles, en faisant justice de nos propres fautes, en multipliant nos créations et notre solidarité.

Notre foi est qu’il y a en marche dans le monde, parallèlement à la force de contrainte et de mort qui obscurcit l’histoire, une force de persuasion et de vie, un immense mouvement d’émancipation qui s’appelle la culture et qui se fait en même temps par la création libre et le travail libre.

Ces ouvriers et ces intellectuels hongrois, auprès desquels nous nous tenons aujourd’hui avec tant de chagrin impuissant, ont compris cela et nous l’ont fait mieux comprendre. C’est pourquoi si leur malheur est le nôtre, leur espoir nous appartient aussi. Malgré leur misère, leurs chaines, leur exil, ils nous ont laissé un royal héritage que nous avons à mériter : la liberté, qu’ils n’ont pas seulement choisie, mais qu’en un seul jour ils nous ont rendue !
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28 octobre 2006 6 28 /10 /octobre /2006 21:09
Parlons chiffons ! Du 13 au 16 octobre 2006 se tenait à Paris la 3e édition du Salon de la mode éthique (cf. www.ethicalfashionshow.com). Pour qui en serait resté au pull informe façon éleveurs de chèvres du Larzac, associé au refus de la féminité, à la consommation de drogues et autres idées folles, la "mode écolo" ce n'est plus du tout ça ! Mais plutôt ceci :


Trois domaines, parfois combinés, étaient mis en valeur : la production textile écologique, le "développement durable" et les matériaux recyclés. Si les stands africains, qui donnaient presque tous dans l'ethno-folklorique, étaient plutôt désertés des visiteurs, les créateurs d'Asie par contre ont rencontré un vif succès. Non pas la Chine, puissance textile certes, mais, comme on sait, peu versée dans l'écologie et qui n'était que médiocrement représentée, mais l'Inde et les pays d'Asie du Sud-Est. L'association thaïlandaise SoiWat présentait les jeunes créateurs de Bangkok dont des pièces uniques d'un des grands noms de la mode de demain... dont j'ai malheureusement oublié le nom !

L'Asie Centrale était représentée par les manteaux traditionnels en soie brochée de la marque mongole Torgo, et là je dois dire que j'ai craqué - le petit manteau noir élégamment porté par une belle des steppes longiligne, sur moi ce n'était pas mal non plus... Où l'on apprend aussi qu'en Mongolie, la fleur de lys est un motif ornemental très prisé. Les vestes modernes coupées dans de la soie de kimono de la marque franco-japonaise Aoi étaient encore plus remarquables, mais là on atteint la haute-couture et les prix qui vont avec.

Côté Occident, les modèles en coton biologique, chanvre ou fibres de bambou de la sympathique Grace Trance sont la meilleure illustration de l'alliance retrouvée entre écologie et féminité (voir ci-dessus). Ils ne sont encore disponibles qu'aux USA et c'est bien dommage. Sympathique aussi, le tour du cou en vison blanc doublé de tissu pied-de-coq de Rachel Fortin, spécialiste en fourrures recyclées (non, je n'ai pas craqué !). Dans notre monde de consommation effrénée et du tout jetable, le recyclage ou récupération de matériaux usés a encore bien du chemin à faire pour s'imposer, mais s'il est un domaine où l'idée passe bien c'est celui de la fourrure. Et Rachel Fortin sait faire du neuf avec du vieux et vous transforme votre manteau de fourrure défraîchi en quelquechose de beaucoup mieux. Il suffit d'aller à Montréal... (cf. www.rachelf.ca)

Enfin une mention spéciale pour Seyes, une jeune marque française de pulls en coton pour hommes et pour femmes à porter tous les jours : culture biologique, commerce équitable et projet de développement durable en Inde (région du Madhya Pradesh), teinture sans métaux lourds et confection "Made in France" avec toutes les garanties et la qualité qui en découlent et, très important aussi, les créations d'emplois, bref l'anti-délocalisation... Et ça marche ! (cf. www.seyes.fr)
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21 octobre 2006 6 21 /10 /octobre /2006 22:38
La Géorgie est un pays du Caucase dont on parle peu. Sans doute est-il trop lointain, trop compliqué, et trop éloigné de nos préoccupations pour justifier l'envoi de correspondants sur place. Le peu que l'on en retient est que, comme l'Ukraine, il a connu une révolution pacifique qui a porté au pouvoir un nouveau président réputé démocrate. Et celui-ci bénéficie comme tel d'un a priori favorable.

En novembre 2003, la "révolution des roses" qui conduisit à l'éviction du président géorgien Edouard Chevardnadzé fut en effet saluée par les médias occidentaux comme une victoire de l'esprit démocratique. Chevardnadzé, ancien ministre de Gorbatchev, avait pourtant jusque là une bonne réputation, mais son régime apparut alors excessivement corrompu et les élections parlementaires qui venaient de se dérouler, entachées de fraude. Le 23 novembre, il dut démissionner. Les présidentielles anticipées qui suivirent portèrent au pouvoir en janvier 2004 l'un des principaux candidats de l'opposition en la personne de Mikhaïl Saakachvili, dont les partisans furent aussi les grands vainqueurs des élections législatives de mars 2004 et viennent de remporter les municipales d'octobre 2006.

Vu de l'extérieur, tout semblait donc aller sinon bien, du moins beaucoup mieux au pays des roses. Mais c'était sans compter les épines !

Car, selon l'une des anciennes collaboratrices de Saakachvili aujourd'hui réfugiée à Moscou, Irina Sarichvili, qui dirige le mouvement d'opposition Imedi (Espoir), la Géorgie d'aujourd'hui n'est rien moins qu'une "dictature fondée sur la terreur et la violence" où "les droits démocratiques et les libertés des citoyens sont réprimés" et où le nombre des détenus politiques croît exponentiellement. D'après Madame Sarichvili, plusieurs dizaines de membres de l'opposition seraient en détention de même que nombre de simples citoyens dont le seul tort est d'avoir critiqué le nouveau régime. Ayant elle-même été victime de mesures d'intimidation sous Chevardnadzé, Irina Sarichvili semble savoir de quoi elle parle. Dans une conférence de presse rapportée par l'agence russe RIA Novosti, elle ajoute que, dans les prisons géorgiennes, "les détenus sont victimes de tortures et de brimades massives". "En l'absence de motifs d'inculpation, les procès n'ont jamais lieu. Le fait que les accusations avancées ne soient pas argumentées n'est pas un secret pour les autorités, mais leur objectif est d'arracher des aveux". Et Madame Sarichvili d'en appeler aux organisations internationales de défense des droits de l'homme...

De même, d'après un analyste russe, Piotr Romanov, les militants de l'opposition les plus actifs ont été jetés en prison sous le prétexte de complot et le scrutin a été anticipé de sorte que le reste de l'opposition n'ait pas assez de temps pour se réorganiser. Enfin, toujours selon l'opposition, de véritables "escadrons de la mort" opèreraient depuis longtemps sur le territoire géorgien sous l'oeil approbateur du président.

Et l'opposition géorgienne dénonce également des irrégularités grossières dans les dernières élections municipales où le "Mouvement national" du président Saakachvili a fait un triomphe... jusqu'à recueillir 114% des voix dans l'une des circonscriptions !

Affabulations russes ? Sans doute pas tant que ça, si l'on en croit un rapport d'Amnesty international de novembre 2005 - par conséquent d'un an antérieur aux dernières élections - intitulé pudiquement "Torture et mauvais traitements : des pratiques encore inquiétantes après la révolution des roses". Ce rapport se fonde sur des éléments d’information recueillis sur le terrain au cours de trois missions d'enquête menées à Tbilissi et Zugdidi en 2004 et 2005, ainsi que sur des entretiens avec plusieurs détenus des centres de détention n° 1 de Tbilissi et n° 4 de Zugdidi.

Il y est fait état de tortures et mauvais traitements visant des hommes, des femmes et des enfants en nombre non précisé "en l'absence de statistiques exhaustives et fiables". Suit un florilège des traitements appliqués aux détenus : électrocution, pose de sacs en plastique sur la tête, suspension à une barre entre deux tables, brûlures de cigarette et de bougie, placement du canon d’une arme à feu dans la bouche et menace de tirer, pose d’un bandeau de ruban adhésif sur les yeux, coups donnés avec la paume de la main sur les oreilles, menaces de coups à l’encontre de membres de la famille du détenu, bâillonnement de manière à ce que le détenu ne puisse pas crier, coups de matraque et de crosse de fusil, coups de pied.

Entre autres cas de torture manifeste, Amnesty International présente celui de Gueno Koulava, suspendu à une barre placée entre deux tables et frappé à coups de pied et de matraque, avant d’être projeté à terre, et brûlé à l’avant-bras avec une bougie. Toutefois la plupart des cas sont passés sous silence et les victimes se voient dissuadées de porter plainte sous peine de représailles. Ainsi, malgré les dénégations des autorités locales, un expert médico-légal de Zugdidi rapportait en mai 2005 qu’il avait régulièrement examiné des personnes présentant des lésions corporelles qui avaient pu être causées par des actes de torture ou des mauvais traitements.

Je cite la suite du rapport : "Selon le témoignage de Vakhtang Goutchoua, une quinzaine de policiers, dont un seul ne portait pas de masque, l’ont interpellé chez lui à l’aube du 18 avril. Ils l’ont conduit dans les locaux de l’unité spéciale de la police, rue Kedia, à Zugdidi, et soumis à des mauvais traitements quatre heures durant, jusqu’à environ 8 heures du matin. Selon ses propres termes : "Ils m’ont battu et frappé à coups de pied et de crosse de fusil. J’étais par terre la plupart du temps. Ils voulaient me mettre un sac plastique sur la tête, mais y ont renoncé lorsque je les ai implorés de ne pas le faire en raison de graves problèmes pulmonaires." D’après Vakhtang Goutchoua, les policiers voulaient qu’il signe des "aveux" concernant sa participation en juin 2002 à l’homicide de Jamal Narmania, ancien représentant de l’État dans la région."

Autre exemple : "Alexandre Mkheïdze, architecte âgé de vingt-sept ans, a été arrêté par la police dans le village de Tsqneti, non loin de Tbilissi, le 6 avril 2005. Il affirme avoir été battu et frappé à coups de pied alors que les policiers le conduisaient au ministère des Affaires intérieures, où il aurait de nouveau été battu. Il a ensuite été transféré au centre de détention provisoire n°1 de Tbilissi. Le médecin qui l’a examiné à son arrivée a enregistré sa plainte concernant des mauvais traitements infligés par la police, tout en le jugeant "en bonne santé". Deux jours plus tard seulement, Alexandre Mkheïdze a été examiné lors de son transfert au centre de détention au secret pour enquête n°1 de Tbilissi. Cette fois-ci, le médecin a observé une ecchymose bleu foncé sur son tibia droit, une éraflure sur sa main droite couverte d’une croûte rouge foncé et une ecchymose bleu-jaune foncé sur la partie interne de sa cuisse droite, près de l’aine. Il a ajouté qu’Alexandre Mkheïdze se plaignait de douleurs à la tête, à la nuque et à la colonne vertébrale et affirmait que ces blessures lui avaient été infligées par les policiers dans le village de Tsqneti. Cette allégation a été confirmée deux semaines plus tard par une enquête médico-légale."

En outre, "certaines modifications de la loi adoptées depuis la "révolution de la rose", telles que la négociation de la peine, ont été dénoncées par des avocats et des défenseurs des droits humains convaincus qu’elles accroissaient le risque que les détenus soient soumis à des actes de torture ou autres mauvais traitements aux mains des forces de l’ordre."

Le rapport dénonce aussi l’impunité dans les affaires de torture et s’inquiète de ce que les procureurs n’ouvrent pas systématiquement d’enquêtes sur toutes les allégations de torture et de mauvais traitements. Les auteurs présumés ne sont pas déférés devant la justice et lorsque des enquêtes ont été ouvertes sur de tels faits, elles se sont rarement avérées impartiales. Parfois, les membres du bureau du procureur étaient eux-mêmes impliqués dans les tortures et mauvais traitements censés avoir été infligés au détenu... Souvent, les investigations, démarrées tardivement, n’ont pas été approfondies. Et dans plusieurs affaires, l’enquête n’a pas été menée de manière exhaustive – lorsqu’elle a été diligentée.

Une évolution inquiétante a même été constatée au cours des derniers mois [de 2005] : selon certaines informations, les forces de sécurité auraient, à plusieurs reprises, fait usage d'une force excessive contre des prisonniers, à la suite de quoi plusieurs détenus sont morts et des dizaines ont été grièvement blessés. Il a été allégué également que la police utilise fréquemment une force excessive lors des arrestations, ce qui se solde souvent par la mort des suspects...

Le 19 mai 2006, le Comité contre la torture de l'ONU faisait, dans un rapport assorti de recommandations au gouvernement géorgien, un constat similaire sur, je cite, la persistance de l'impunité et de l'intimidation, en particulier s'agissant du recours excessif à la force, y compris la torture, de la part des responsables de l'application des lois ; sur l'anonymat des unités spéciales de la police, dont les agents sont souvent masqués lorsqu'ils exécutent des opérations d'arrestation et ne portent pas de badges d'identification ; et sur l'absence de textes de loi prévoyant l'octroi sans délai d'une réparation appropriée. Le Comité a également fait part de ses préoccupations quant au nombre élevé de décès soudains lors des gardes à vue, et à l'absence totale d'informations détaillées concernant les enquêtes indépendantes sur ces décès.

De même, selon l'Association des jeunes avocats géorgiens GYLA (pour Georgian Young Lawyers Association), les aveux des prévenus seraient le plus souvent obtenus par la torture sous toutes ses formes (coups, électrocution, étouffement, brûlures diverses et menaces à l’encontre des membres de leurs familles). Mais ce qui inquiète le plus Ana Dolidze, présidente de GYLA, ce sont les déclarations officielles qui, par leur côté rassurant et absolutoire, peuvent constituer, pour les forces de l’ordre, un encouragement à poursuivre en toute impunité la pratique de la violence et de la torture. Elle rappelle, à cet effet, les déclarations du président Saakachvili qui, la veille de la publication du rapport d’Amnesty International, se vantait d’avoir "éradiqué la violence policière" depuis son arrivée au pouvoir...

Devant l'accumulation des témoignages, les satisfecit médiatiques adressés aux autorités géorgiennes ne laissent pas de surprendre, de même que les circonlocutions des observateurs de l'OSCE et de l'Union européenne à propos des dernières élections qui se seraient selon eux déroulées "dans le respect général des libertés fondamentales", malgré les 30% de candidats de l'opposition dont la candidature a été invalidée, les nombreuses circonscriptions où ne se présentait qu'un seul candidat - celui du pouvoir bien entendu, - les programmes dits d'aide sociale et la distribution de compléments de pension lancés à grand renfort de publicité par les autorités en place en pleine campagne électorale, la collusion entre certaines commissions électorales et les activités de campagne du parti au pouvoir, et autres "sérieux problèmes de procédure".

Si l'on ajoute à cela la corruption qui gangrène tout l'appareil de l'Etat et les déclarations bellicistes de Mikhaïl Saakachvili à l'encontre des Ossètes et des Abkhazes... (le nouveau président "démocratique" de Géorgie brigue apparemment le titre disputé d'agité du Caucase)

Bref, tout va bien en Géorgie !
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8 octobre 2006 7 08 /10 /octobre /2006 00:20

Dépôt de munitions taliban en feu à Nawzad après une attaque des troupes britanniques

Suite de l'article du Daily Mail.

"Les Talibans, auparavant considérés comme une force équipée de bric et de broc sans armement sophistiqué et sans connaissances tactiques, ont évolué. Le conflit a permis au trafic d'héroïne de prospérer et avec ses coffres remplis à ras bord l'armée de guerilla a acheté de l'équipement tel que  lunettes à infra-rouge.

Les Talibans ont aussi recruté des légions de mercenaires qui se sont déversés depuis le Pakistan dans la province afghane de Helmand occupée par les Britanniques. Contrairement à ce qu'affirme le Ministre de la Défense, les soldats disent que les combats se poursuivent sans interruption. Dans les dernières 48 heures, des troupes parachutistes et des Royal Marines, appuyés par de l'artillerie lourde ont conduit des opérations décrites comme "percée et infiltration" dans la région de Sangin.

Il paraîtrait que deux Britanniques au moins ont été grièvement blessés pendant un combat que les soldats ont qualifié de "hardcore". C'était le dernier assaut mené par le 3e bataillon parachutiste avant qu'ils passent la main au 42e commando des Royal Marines.

L'image de la vie dans la principale base britannique, Camp Bastian, est un peu plus encourageante. La frustration née du rationnement de la nourriture dans les cuisines a conduit les soldats à prendre les louches des mains des cuisiniers pour se servir eux-mêmes.

Ils ont commencé leur mission avec ce que les soldats nomment "munitions proportionnées pour temps de paix", moins qu'ils en recevraient en cas de bataille. Ces fournitures ont été dénoncées comme étant trop faibles (120 cartouches par fusil et deux grenades). Les hommes équipés de fusils emportent maintenant plus de 200 cartouches, et beaucoup ont troqué leurs fusils contre des armes automatiques appelées Minimi.

Depuis que les forces britanniques sont arrivées dans la province d'Helmand en mai, il y a eu peu de succès. L'un a été l'efficacité de l'hélicoptère Apache, qui a sauvé beaucoup de vies.

La nuit passée, le Ministre de la Défense a déclaré : "Des efforts considérables sont faits pour assurer aux soldats en première ligne le meilleur soutien à tous points de vue. Les dures réalités du combat créeront inévitablement des frictions à propos de tel ou tel incident particulier, mais chacun fait de son mieux devant le défi que nous affrontons".

"Le Ministre de la Défense se réjouit de ces témoignages durs et touchants qui dépeignent la réalité du difficile travail sur la ligne de front. Le 3e bataillon parachutiste s'est magnifiquement conduit dans des circonstances extrêmement difficiles. Aux côtés de l'armée nationale afghane, ils ont affronté les Talibans qui n'ont rien à offrir au peuple afghan. Nous les saluons."
 M. Nicol pour le Daily Mail, 1er octobre 2006
Pour la version originale, cf. www.dailymail.co.uk/pages/live/articles/news/news.html?in_article_id=407830&in_page_id=1770&ico=Homepage&icl=TabModule&icc=NEWS&ct=5
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7 octobre 2006 6 07 /10 /octobre /2006 20:02
Les médias en parlent beaucoup moins que de l'Irak, peut-être parce que cela nous concerne beaucoup plus directement - puisque, contrairement à l'Irak, des soldats français y sont engagés. Je veux parler de l'Afghanistan. Pourtant les nouvelles sont mauvaises et pire...

Entre tribalisme, Islam radical et monoculture des opiacés, le pays n'est certainement pas sur la voie de "la démocratie". Et les derniers événements laissent penser que la situation échappe de plus en plus aux troupes de l'OTAN dont font partie des unités françaises. On finit d'ailleurs par se demander ce que nous faisons là-bas. La situation militaire est assez mal engagée depuis que les Talibans, toujours soutenus par le Pakistan, lui-même allié des USA... ont repris du poil de la bête (ils ont d'ailleurs leur base-arrière dans la ville pakistanaise de Quetta, au Sud de la frontière afghane). Les bavures, exactions et autres cas de torture de la part de certaines troupes otanesques, notamment dans la prison de Begram, n'arrangent rien à l'affaire. Les avantages politiques, s'il y en a, iront aux Anglo-saxons. Quant aux perspectives économiques, ce sont les Indiens, les Turcs et les Russes qui, très discrètement, en tirent la meilleure part. On pourrait encore comprendre que les Français se cantonnent au Nord et à Kaboul pour apporter une aide logistique, militaire et humanitaire aux populations tadjikes, plus conciliantes, mais plus au Sud... le chaos s'installe.

Au détour d'un article du Daily Mail du 1er octobre 2006 que je traduis ci-après, on apprend le sort épouvantable fait par les Talibans à des soldats français - le nombre n'est pas précisé, non plus que la date, mais il pourrait s'agir des deux français des "Forces spéciales" du 1er régiment parachutiste d'infanterie de marine de Bayonne (1er RPIMa) tués le 20 mai 2006 dans des circonstances sur lesquelles nos autorités sont restées très discrètes.

L'article de Mark Nicol intitulé de façon assez parlante, "La guerre d’Afghanistan ou le Vietnam des Anglais", reprend les extraits de messages adressés par les soldats anglais à leurs familles, étant entendu que ces soldats ont interdiction d'informer la presse sur l'état réel de la situation qu'ils rencontrent, sous peine de sanctions...


Soldat du 3e bataillon parachutiste britannique embusqué dans les ruines - Afghanistan, 2006

"Une moto quad traverse en cahotant le terrain désertique ravagé par la bataille, les restes de trois soldats britanniques arrimés à l'arrière, pendant qu'un hélicoptère Chinook bourdonne au-dessus. De jeunes soldats épuisés échangent sporadiquement des tirs d'armes légères avec un ennemi invisible. Une unité d'infanterie patrouille nerveusement dans un village en feu... Telles sont les images qui révèlent la réalité grinçante, funeste de l'engagement britannique en Afghanistan. Et elles ont été délivrées au monde par les troupes elles-mêmes, en colère... et assiégées.

Les images ont été prises ces derniers mois avec des appareils numériques par des hommes de troupe appartenant aux forces combattantes du 3e bataillon parachutiste. Pour la plupart, elles ont été expédiées en Angleterre par courriel en contournant les tentatives du gouvernement pour dissimuler aux regards du public la vraie nature du conflit.

Ce déploiement de troupes est ce que les Ministres, bien à l'abri dans leurs bureaux de Whitehall, qualifient de "mission de maintien de la paix". Il est de notoriété publique que John Reid, aujourd'hui Secrétaire d'Etat à l'Intérieur, avait annoncé que les Britanniques rempliraient leurs obligations militaires sans avoir besoin de tirer un seul coup de feu. La nouvelle équipe gouvernementale s'est vu déconseiller de rendre visite aux troupes, sauf visites bien cadrées d'avance.

Mais ces images exceptionnelles, appuyées par les commentaires des courriels, disent la vérité de ces combats sauvages et sanglants contre les Talibans, des escarmouches incessantes, de la pénurie de munitions et même de vivres. L'eau manque et les soldats en sont réduits à boire dans des rivières souillées. Ils mangent le pain chipé aux troupes afghanes. Les recrues sont assaillies par les mouches des sables et les scorpions et rendues fou par le stress. Ils sont attaqués par des miliciens talibans à moto qui ouvrent le feu tout en maintenant des enfants sur le guidon.

Les batailles se déroulent sur fond de villages en feu réduits en miettes par les bombardements aériens. Des combattants pris de panique ont parfois fait usage de leurs téléphones satellites pour appeler l'Angleterre et passer le message déchirant qu'ils sont sur le point de mourir. L'illustration en a été donnée dimanche dernier au Daily Mail par des soldats affirmant que l'ennemi est en plus grand nombre, plus déterminé et mieux équipé que les politiciens veulent bien le reconnaître. Ce n'est pas, disent-ils, une mission de maintien de la paix, mais un nouveau Vietnam.

Selon un soldat qui a accepté d'accorder un entretien par courriel : "C'est un sort pire que les gens ne l'imaginent chez nous. Les politiques..., salopards de politiques ! Une véritable entreprise de dissimulation à grande échelle que de ne pas dire ce qu'il en est vraiment."

Il y aurait aussi des pressions considérables sur les troupes parachutistes pour leur interdire de parler de l'Afghanistan lorsqu'elles seront rapatriées en Grande-Bretagne ce mois-ci. "Ils essaient de nous effrayer, confirme un soldat. C'est déloyal. L'officier en chef a prétendu qu'il assomerait tous ceux qui seront reconnus avoir parler ouvertement de ça".

Hier, cependant, le Ministre de la Défense a déclaré publiquement que le témoignage des soldats serait bienvenu, alimentant du même coup le soupçon que le manteau de secret qui enveloppe jusqu'ici les opérations a été voulu par les politiciens plutôt que par les militaires.

Dans les courriels, les soldats évoquent crûment la sauvagerie des engagements qu'ils doivent dissimuler au public de retour à la maison. L'un dit : "Vous voyez les Talibans couper à travers champs sur leurs motos, les armes dans une main, leurs enfants dans l'autre. Ils pensent que nous ne tirerons pas. Il y a eu des incidents terribles. C'est horrible de tuer un enfant. Rien ne peut vous y préparer".

A la suite d'une embuscade où trois soldats britanniques ont trouvé la mort dans la ville de Musa Qalah le 1er août, un sous-officier a été contrait à des actes dramatiques pour récupérer le corps d'un soldat et essayer dans sauver un autre fait prisonnié. Un courriel en possession du journal affirme : "Ce lieu [Musa Qalah] est un trou. Le premier char a été touché par un IED [Improvised Explosive Device, une mine je suppose], puis un char de secours a été démoli : ils l'ont touché avec un RPG [Rocket Propelled Grenade, une roquette ?]. C'était un combat de guerre, pour vous dire, on avait même fixé des baïonnettes à nos armes". Les soldats ont dû utiliser une pelle pour sortir de l'épave le corps de l'un de leurs camarades. "Nous avons libérer l'écoutille pour sortir le corps alors qu'on nous tirait dessus. Le plus dur a été de lui marcher dessus pour ramasser le tout et chercher sa plaque".

L'une des victimes de l'accident était encore en vie et avait été capturée par les Talibans. Environ 100 soldats britanniques ont encerclé Musa Qalah en donnant 30 minutes aux non-Talibans pour partir. Toute personne restée sur place a été considérée comme une cible légitime - ce qui évoque à nouveau l'ombre du Vietnam. Le soldat capturé a été retrouvé mort par ses camarades. On ne sait s'il a été tué par les Talibans ou s'il est mort de ses blessures.

La nuit passée le Ministre de la Défense a déclaré qu'il "n'y avait pas meilleure illustration de l'extraordinaire engagement des soldats britanniques". La prestation de la Royal Air Force est aussi remise en question par les troupes au sol. Ceci fait suite à la plainte du major parachutiste James Loden la semaine dernière contre "l'inutilité absolue" de la RAF.

Décrivant l'échec du ravitaillement des troupes prises au piège dans un camp situé dans le village rasé de Sangin, un sous-officier parachutiste raconte : "Une zone de largage a été délimitée, sous le feu et de nuit. Sa position était parfaitement connue. L'Hercule est venu et l'a complètement manquée. Ils ont fait le largage directement au-dessus des positions des Talibans, une centaine de mètres au-delà du camp. Nous avons entendu un grand hourra des Talibans. Ça a été un grand coup pour nous. Nous attendions le largage depuis deux jours. Nous nous réjouissions quand il s'est approché, puis nous l'avons vu tomber dans les mains des Talibans".

Cela n'a pas été le seul ravitaillement a tourner méchament mal. Un autre a presque coûté la vie à des troupes canadiennes. "On nous a annoncé qu'un convoi britannique arrivait avec les munitions, donc nous attendions les véhicules. Il y avait deux gars dans l'une des positions entourrées de sacs de sable. Elle avait été pulvérisée à deux reprises par les roquettes. Ils ont entendu le grondement et ont aperçu une sorte de tank qui pointait au coin de la rue. Ils ne savaient pas ce que c'était, mais ce n'était pas britannique. Ils ne pouvaient pas voir correctement. Ils ont pensé que c'était du vieux matériel russe dont les Talibans se seraient emparés. Donc il y a deux gars qui descendent la rue en courant avec des lance-roquettes sur le point de les pulvériser, jusqu'à ce qu'un des gars remarque cette feuille d'érable sur le devant de l'un des chars. Nous avons pris la radio et avons eu une sérieuse explication sur le thème : pourquoi n'avions-nous pas été prévenus qu'ils venaient ?".

L'état moral et physique des forces britanniques fait aussi question. Le témoignage des courriels laisse entendre que les cas de soldats [ici une saine censure - inutile de saper un peu plus le moral des troupes !, - disons qu'ils sont verts de peur]... sont maintenant courants. Ils se réveillent de leurs cauchemars en hurlant et ont même fait des appels désespérés à leurs familles pendant les combats.

Une fois, les parachutistes ont été appelé au secours de troupes afghanes et de Forces spéciales françaises tombées dans une embuscade des Talibans. Transportés là par un hélicoptère Chinook, au moment d'atterrir, ils n'en croyaient par leurs yeux. Le sol était jonché des corps des soldats afghans, et de plus en plus de balles touchaient l'hélicoptère.

"Je n'arrivais pas à croire que nous allions sortir de cet hélicoptère et charger contre un mur de feu, avoue l'un." "Personne ne voulait sortir [...] Un type, raide de peur, se cramponnait à l'intérieur jusqu'à ce que nous le traînions et le tournions vers la porte."

"Nous devions tirer et manœuvrer sur 200 mètres à découvert. Le spectacle était celui d'un abattoir humain. Nous avons repoussé les Talibans mais c'était trop tard pour sauver les Français. Nous tremblions tous lorsque l'hélicoptère nous a ramené à la base. L'un des survivants afghans nous a raconté que les Français avaient été attachés, puis éviscérés vivants. C'est l'une des choses les plus horribles que j'ai jamais entendue".

Il y a eu des rumeurs contradictoires à propos de l'Armée nationale afghane. Cependant, l'un des soldats les décrit comme "terriblement durs". Ils ont continué à se battre aux côtés des Britanniques bien que des membres de leurs familles aient été tués par les Talibans.

Quelques soldats britanniques en permission ont dit à leurs familles qu'ils craignaient de mourir. Mais après les atrocités contre les Français, ils disent qu'ils préfèrent être tués que capturés.
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30 septembre 2006 6 30 /09 /septembre /2006 22:45

















Pyramide de chaussures, Paris, place de la Bastille, le 30 septembre 2006

Après la campagne internationale contre les mines antipersonnelles qui a débouché sur le Traité d'Ottawa (1997), aujourd'hui ratifié par 154 Etats (parmi ceux qui se refusent à signer on notera en bonne place les USA et Israël aux côtés de la Corée du Nord...), l'association Handicap international soulève depuis 2003 la question de l'interdiction d'une arme aux effets similaires : la bombe à sous-munitions, dont les nombreuses munitions non explosées ne sont autres que... des mines antipersonnelles, cf. www.sousmunitions.org et le texte que je consacrais il y a quelques jours à ces armes anti-civils :
http://geopolis.over-blog.net/article-3960135.html


"...les attaques menées pendant les guerres ne doivent jamais viser intentionnellement les populations civiles. Les armes employées par les parties en conflit doivent être utilisées de façon discriminante et non disproportionnée par rapport à la valeur de l'objectif militaire, interdisant toute attaque militaire où les pertes et dommages attendus seraient excessifs." Voilà pour les principes du droit international. Dans la pratique,
  • 61.000 bombes à sous-munitions contenant 20 millions de sous-munitions ont été larguées par les USA, l'Arabie séoudite, la France et l'Angleterre lors de la Guerre du Golfe (17 janvier - 28 février 1991);
  • 1.765 bombes à sous-munitions contenant 295.000 sous-munitions ont été larguées par les USA, l'Angleterre et les Pays-Bas sur l'ex-Yougoslavie (Serbie et Kosovo, mars - juin 1999) ;
  • 1.228 bombes à sous-munitions contenant 248.056 sous-munitions ont été larguées par les USA sur l'Afghanistan (octobre 2001 - mars 2002);
  • 13.000 bombes à sous-munitions contenant 1,8 à 2 millions de sous-munitions ont été à nouveau larguées par les USA et l'Angleterre sur l'Iraq (mars - avril 2003);
  • et le nombre des sous-munitions non explosées lancées par Israël sur le Liban est estimé à 1 million (12 juillet - 14 août 2006)...
  • A qui le tour ?


Achtung, Minen !
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29 septembre 2006 5 29 /09 /septembre /2006 23:02
Je ne vais pas annoncer les résultats de la prochaine coupe du monde de football, mais proposer un parallèle entre deux pays fort différents de prime abord : d'une part en Amérique du Sud, le Brésil (8,5 millions de km2, 186 millions d'habitants), de l'autre en Europe, la France (0,5 million de km2, 65 millions d'habitants).

Il fut un temps - très bref (1555-1560) - où le Brésil s'appela "France antarctique". C'était l'époque où l'amiral de Villegagnon tentait d'implanter une colonie française (et protestante) dans la baie de Guanabara (Rio de Janeiro). Le Brésil est resté portugais (et catholique), mais l'influence française ne s'est jamais démentie depuis lors, pour le meilleur... et pour le pire. Dans le meilleur, on peut compter la francophilie des Brésiliens, les voyages de savants, la tradition des ouvrages d'art à la française, etc. ; dans le pire, l'abolition de la monarchie en 1889 à la suite d'un coup d'Etat fomenté par des officiers saint-simoniens et de grands propriétaires terriens mécontents de l'abolition de l'esclavage... Ah, le modèle de la République française ! Ces Messieurs reprochaient à l'empereur Dom Pedro II la Loi d'Or de 1888 par laquelle il avait mis fin à l'esclavage. Mais puisqu'il s'agit quand même d'un pays civilisé, on ne lui coupa pas la tête et on l'envoya finir ses jours en exil... en France. La République fut donc proclamée à titre provisoire le 15 novembre 1889 dans l'attente d'un référendum : république ou monarchie ? Bien entendu, le référendum, on se garda bien de l'organiser ! Et ce n'est qu'en 1993, soit un siècle plus tard, qu'il a eu lieu et que les Brésiliens ont enfin été consultés sur le choix du régime. La monarchie y a quand même recueilli 10% des voix... Entre temps, comme la république française avait eu sa Vendée, celle du Brésil a eu la révolte de Canudos (1893-1897), écrasée dans le sang...

Côté français, le début du XXe siècle montre un grand engouement pour "la petite sœur latine de la France" (sic) et ses représentants de passage : l'aviateur Santos-Dumont, le compositeur Villa-Lobos, etc. Villa-Lobos, par exemple, c'était un peu la latinité aimable opposée à la germanité wagnérienne. Mais alors que la France avait toujours fait figure de modèle, les Brésiliens étant prompts à adopter les modes venues de Paris, il semble que le rapport se soit ajourd'hui inversé, en tout cas dans l'esprit des Français. Voilà-t-y pas que nous voulons à toutes forces nous transformer en Brésiliens ! Cela a commencé avec le football, et maintenant certains voudraient appliquer un prétendu modèle brésilien à l'ensemble de la société française qui n'en peut mais. Le métissage, ils appellent ça. Mais c'est bien mal connaître le Brésil, un pays où le sentiment de l'unité nationale est très fort et dont la population n'a pas changé de composition depuis plus de 50 ans...

Voir aussi : http://geopolis.over-blog.net/article-5577749.html
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28 septembre 2006 4 28 /09 /septembre /2006 00:25
Changeons de registre. Ce n'est pas de la géopolitique, mais à l'heure où l'on cause beaucoup de neurosciences, voici qui peut-être utile pour éviter les impasses d'un scientisme un peu borné...

Alain Berthoz et Jean-Luc Petit, Physiologie de l'action et phénoménologie, Paris (Odile Jacob), 2006.

Analyse et expérience de la perception, du mouvement, de la décision, sont confontrées à la pensée philosophique dans la grande tradition de Husserl. La pensée n’est pas avant l’action ni l’action avant la pensée : l’action contient toute pensée...

Alain Berthoz, neurophysiologiste, est professeur au Collège de France.
Jean-Luc Petit, philosophe, est professeur à l’université Marc Bloch de Strasbourg.
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25 septembre 2006 1 25 /09 /septembre /2006 21:52
A la différence des guerres classiques qui se déroulaient de préférence sur un champ de bataille et opposaient entre elles des armées constituées, les guerres d'aujourd'hui ont étendu le champ des opérations militaires à des territoires entiers, villes et campagnes, des territoires essentiellement peuplés de civils. C'est le constat du général Gareev que je citais déjà ici même http://geopolis.over-blog.net/article-3687844.html : "...le conflit israélo-libanais a révélé une tendance très désagréable [...] Au cours de la première guerre mondiale, les civils avaient constitué 5% des pertes totales. La moitié pendant la Seconde Guerre mondiale [...] Pendant la guerre du Vietnam les civils représentaient déjà 95% des pertes totales. Il se trouve des théoriciens pour faire l'apologie de la guerre dite "sans engagement", quand les belligérants échangent des frappes aériennes et navales sans entrer en contact direct. Mais contre qui ces frappes sont-elles portées? Contre la population des villes, contre les sites industriels et énergétiques, les ponts, les routes, les écoles, les hôpitaux..."

Les armées d'aujourd'hui, celles du moins des grandes puissances, disposent en effet d'un large arsenal plus spécifiquement destiné à l'élimination des civils. Ce sont notamment :
  • Les bombes à sous-munitions, variante perfectionnée des bombes à fragmentation, qui saturent les environs de la cible de nombreuses petites bombes ou sous-munitions de types divers (incendiaires, avec parachute, etc.) et provoquent des destructions dans un périmètre très large. Que l'objectif initial soit seulement militaire ou bel et bien civil, le périmètre touché assure un maximum de pertes "collatérales". Ce type de bombe supprime en effet toute vie humaine dans un rayon de 150 à 300 mètres et mutile ses victimes au-delà de cette distance. De plus, une proportion importante des "bombelettes" ainsi dispersées (40% environ) n'explose pas directement au sol et se transforme alors en autant de mines. Le périmètre bombardé présente donc les mêmes dangers qu'un champ de mines, l'explosion pouvant se produire des mois ou des années plus tard. Ainsi au Laos, où ces bombes ont été utilisées pour la première fois vers 1975, on dénombre encore aujourd'hui de nouvelles victimes civiles, spécialement des enfants.
  • Les bombes à fragmentation proprement dites (Schrapnel), qui libérent des milliers d'éclats propagés à grande vitesse dans des directions aléatoires ou précises suivant l'effet désiré. Ce type de bombe explose de préférence au-dessus de la cible et son enveloppe se divise alors en une multitude de projectiles incandescents qui déchiquettent tout sur leur passage jusqu'à plusieurs centaines de mètres, à une portée qui excède largement le souffle de l'explosion elle-même.
  • Les bombes de 15.000 livres (7 tonnes), dites "faucheuses de marguerites" par l'US Air Force, qui sont également utilisées contre les populations civiles. Composées d'un mélange de nitrate d'ammonium et de poudre d'aluminium, elles provoquent lors de l'explosion une tempête de feu qui calcine tout ce qui se trouve dans un rayon de 600 mètres et consume tout l'oxygène de l'air. L'onde de choc est ressentie à plusieurs kilomètres à la ronde. Le vide créé à cette occasion fait éclater les organes internes de quiconque est à proximité. De telles bombes, les plus grandes bombes non-nucléaires existantes, ont déjà servi au Vietnam et en Irak et un modèle de 9,5 tonnes est à l'étude.
  • Les bombes incendiaires de sinistre mémoire (bombardement de Dresde en février 1945), qui exploitent les propriétés inflammables du phosphore pur ou phosphore blanc, par ailleurs un poison violent. Ces bombes au phosphore, comparables aux bombes au napalm lancées au Vietnam, sont toujours employées par l'armée américaine (Irak, mars-avril 2003 et 2004, à Falloudja) et dernièrement par Israël (Liban, 2006).
  • Les bombes thermobariques, qui contiennent des explosifs chargés de polymères ou des explosifs à explosion diffuse. Lorsqu'elle pénètre dans les bâtiments, abris souterrains ou  tunnels, l'explosion de la bombe créé un souffle tel que tout l’oxygène est aspiré des espaces et des poumons de quiconque se trouve à proximité. De telles bombes  "aspirantes" ont récemment servi contre le Liban.
  • Enfin, les obus à l'uranium appauvri, qui permettent le recyclage à moindres coûts d'un déchet de l'industrie nucléaire civile (uranium 238). Le métal d'uranium étant particulièrement résistant, ces obus traversent les blindages sans exploser mais se vaporisent en partie, formant un nuage aérosol d'uranium jusqu'à 50 kilomètres alentours qui, s'il est respiré, s'infiltre dans l'organisme. Il provoque alors à la longue des maladies graves des reins, du système nerveux, des os et des articulations, des cancers et des effets thératogènes sur les enfants à naître. Ces obus ont été employés en grande quantité en Irak (1991 et 2003), en Afghanistan (2001) et en Yougoslavie (1999).
  • Et bien sûr, les bombes atomiques comme celles à l'uranium 235 et au plutonium 239 lancées sur Hiroshima et Nagasaki (6 et 9 août 1945) qui avaient causé à elles deux près de 250.000 morts parmi les habitants et en avaient irradié trois fois autant. Si elles n'ont plus servi depuis lors dans les conflits, les bombes atomiques constituent toujours une part de l'arsenal des puissances "nucléaires", en des proportions d'ailleurs variables, les stocks allant de plus de 10.000 ogives à moins de 10 (Etats-Unis, Russie, Chine, France, Israël, Grande-Bretagne, Inde, Pakistan et Corée du Nord par ordre décroissant).
Que l'usage de ces armes ait provoqué de très nombreux morts et blessés dans les populations civiles, nul n'en disconvient. Mais loin qu'il s'agisse de simples et regrettables "dommages collatéraux", on peut se demander si les civils ne sont pas devenus une cible directe et délibérée. Dans la mesure où les derniers pays à avoir fait usage de bombes à fragmentation, de bombes au phosphore ou de bombes à l'uranium sont ou se disent démocratiques (Israël, USA et autres membres de l'OTAN), s'agit-il d'une forme nouvelle de guerre démocratique, non plus armée contre armée, mais armée contre populations, où l'on arrose "démocratiquement" d'un tapis de bombes le peuple adverse ? Question dérangeante sans doute, mais qu'il faut pourtant se poser lorsque manifestement le nombre des infrastructures et des bâtiments civils détruits passe de très loin les objectifs militaires endommagés. Qu'il faut se poser aussi lorsque le choix des armes employées privilégie celles dont les effets nocifs perdurent sur le long terme (mines, radiations, toxiques divers), de sorte que les morts, les mutilations, les maladies et les malformations ainsi causées par la guerre se poursuivent indéfiniment après l'arrêt des hostilités. En d'autres termes, de telles armes sont-elles licites lorsqu'on prétend mener des guerres "humanitaires", faire la guerre au nom des droits de l'homme ?

"Ce que nous avons fait est démentiel et monstrueux : nous avons couvert des villes entières de bombes à fragmentation, reconnaissait le chef d’une unité de lance-missiles de la Force de défense israélienne (IDF)" (Haaretz, du 12 septembre 2006). Au total, l'armée israélienne aura tiré sur le Liban près de 1.800 bombes à sous-munitions contenant plus de 1,2 million de petites bombes et de mines, dont 90% dans les dernières heures du conflit... Le faute aux va-t-en-guerre de l'USI (USA et Israël) bien sûr. Mais que dire de la guerre du Kosovo de mars à juin 1999 ? La Serbie, Kosovo compris, a été bombardée à l'uranium par une coalition dont la France, l'Allemagne et la Grande-Bretagne faisaient aussi partie... A la guerre succède un désastre écologique et humanitaire dont nos ennemis d'un jour ne se relèveront jamais. Vae victis !
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20 septembre 2006 3 20 /09 /septembre /2006 22:01
Depuis lundi 18 septembre, les nuits d'émeutes et de manifestations se succèdent à Budapest et dans plusieurs villes de Hongrie. Pour renverser le communisme comme en 1956 ? Non, c'est déjà fait (en 1989-1990). Mais parce que la situation économique du pays est mauvaise, son endettement depuis l'époque communiste excessif (près de 60% du PIB l'année dernière), et que loin d'apporter un mieux la perspective d'intégrer l'Union européenne et les sacrifices qu'elle impose accentuent le marasme. La pauvreté de la population se devine sous la dignité apparente. Elle surprend peut-être plus encore dans une ville comme Budapest avec ses grandes avenues à la Haussmann aux immeubles autrefois cossus... Voilà, pour le contexte.

Mais la cause véritable est ailleurs : la compromission, la corruption, l'inefficience et le mépris des politiciens pour la population. Et de ce mépris, ce je-m'en-foutisme, ces mensonges et cette vulgarité aussi, dont les hommes politiques hongrois n'ont d'ailleurs pas l'exclusivité, les propos proférés en mai dernier - révélés seulement dimanche sur une radio nationale - par le premier ministre, Ferenc Gyurcsany, devant les membres du Parti socialiste qu'il dirige, sont exemplaires. Extraits :

"Nous n'avons plus tellement le choix. Nous ne l'avons plus, parce que nous avons merdé. Non pas un peu, mais complètement. Aucun autre pays d'Europe n'a fait une telle connerie [en laissant filer les déficits publics]. Cela s'explique.  Evidemment, nous avons menti tout au long de ces douze, de ces dix-huit derniers mois. Il est parfaitement clair que ce que nous disions n'était pas vrai. Nous avons dépassé les potentialités du pays dans une mesure inimaginable. Il était inimaginable que le gouvernement du Parti socialiste hongrois allié aux libéraux puisse le faire un jour. Et avec ça, nous n'avons rien foutu pendant quatre ans. Rien. On ne peut pas citer une seule mesure gouvernementale dont nous puissions être fiers – à part le fait que nous avons réussi à nous démerder à la fin [en remportant les élections]. Rien. Quand il faudra faire le bilan devant le pays et montrer ce que nous avons fait pendant quatre ans, qu'est-ce qu'on va dire ? Pendant un an et demi, j'ai dû faire semblant de travailler, faire semblant de gouverner - j'ai failli en crever ! Au lieu de ça, nous avons menti le matin, menti le soir, et même la nuit ! Je ne veux plus faire ça ! Ou bien nous faisons ce que nous avons à faire avec l'homme qu'il faut pour ça, ou bien il faut le faire avec quelqu'un d'autre."

"Nous avons tout fait pour garder secret en fin de campagne électorale ce dont le pays a vraiment besoin, ce que nous comptions faire après la victoire [électorale]. Nous le savions tous, après la victoire, il fallait se mettre au travail, car nous n'avons jamais connu de problèmes de cette envergure."

"A court terme, nous n'avons plus le choix. Janos Veres [ministre des Finances] a raison. Nous pouvons encore faire semblant un petit peu, mais plus longtemps. Le moment de vérité est arrivé. L'aide divine, les flux financiers internationaux, les centaines d'astuces comptables, dont vous n'avez pas à connaître l'existence, nous ont tous aidés pour survivre. Mais c'est terminé. On ne peut pas aller plus loin. On doit avouer dès le premier jour ce qu'on doit faire pour réduire le déficit [des comptes publics] dès cette année, et mettre en oeuvre les modifications fiscales dès le mois de septembre."

"C'est fantastique de diriger un pays. Pendant les dix-huit derniers mois j'en étais capable parce que j'avais une ambition: convaincre la gauche qu'elle pouvait gagner [les élections], qu'elle n'avait pas à courber la tête dans ce putain de pays, qu'elle n'avait pas à faire dans sa culotte devant Viktor Orban [chef de l'opposition de droite]."

Il semble que, plus que le fond de ce discours, dont les Hongrois se doutaient bien, c'est sa forme - et le mépris dont elle témoigne - qui aura mis le feu aux poudres. Il n'est jamais très agréable pour l'électeur de découvrir, et de façon aussi indubitable, que la classe politique s'est payé sa tête aux dernières élections !

Mentir sans scrupule pour se faire élire...
Imposer des mesures économiques brutales à une population qui n'en peut mais...
Et toujours, se cramponner au pouvoir...
Un cas exemplaire, vous dis-je !

Mais en Hongrie toute l'ambiguïté de la situation présente, c'est que cette fois-ci Gyurcsany dit vrai !

(Et merci à MSR pour les extraits)
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16 septembre 2006 6 16 /09 /septembre /2006 19:59
Nouvel exemple de l'effet papillon (cf. ici même : http://geopolis.over-blog.net/article-1900943.html), l'amplification donnée aux propos sur l'Islam du pape Benoît XVI rappelle l'affaire des caricatures danoises (cf. http://geopolis.over-blog.net/article-1901435.html).

Le pape s'est pourtant contenté d'une citation tirée d'une oeuvre clef du dialogue inter-religieux, ces Entretiens de l'empereur Manuel Paléologue avec un musulman dont j'ai parlé précédemment. De plus, il s'adressait à un public d'universitaires chrétiens exclusivement, et non aux musulmans. On voit mal enfin comment le chef de l'Eglise de Rome pourrait penser autrement. On ne peut quand même pas attendre de lui une apologie de l'Islam !

Mais le plus significatif dans cette affaire qui ne fait sans doute que commencer, est l'absence de tout interlocuteur musulman de la trempe de Benoît XVI. Manifestement les imams de l'université d'Al-Azhar en Egypte et autres qu'on nous présente comme des savants de l'Islam sont incapables d'argumenter et de répondre sur le fond. Les protestations faussement indignées et les menaces à peine voilées cachent mal l'incapacité intellectuelle de ces docteurs de l'Islam. Ou alors, qu'on m'en trouve un qui puisse répondre !

En s'inspirant de la démarche de Manuel Paléologue, Benoît XVI s'est pourtant d'emblée placé dans la situation de la controverse théologique et du dialogue respectueux. Manuel avait parlé au milieu des musulmans et, bien que chacun eût campé sur ses positions, les échanges étaient restés courtois. Au Moyen Age, ce genre de controverse religieuse était un spectacle public très couru tant côté chrétien que musulman. Il semble qu'aujourd'hui le dialogue entre Islam et Christianisme a vécu.

Les responsables musulmans qui s'indignent des propos du pape, non seulement lui refusent le respect qu'ils exigent pour eux-mêmes, mais manifestent un refus absolu de tout dialogue avec les non-musulmans. Car dialoguer suppose d'admettre au préalable que l'autre puisse penser différemment de soi-même. S'il est bien évident que de tels échanges, qui se placent à un niveau intellectuel des plus élevés, sont incompréhensibles du fidèle de base, il semble que dans l'Islam d'aujourd'hui même les imams n'ont pas les connaissances théologiques et la finesse d'esprit nécessaires pour y prendre part.

On est loin du lettré de Bagdad... Car Manuel Paléologue, au XIVe siècle, avait, lui, trouvé un interlocuteur à sa mesure.
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16 septembre 2006 6 16 /09 /septembre /2006 19:54
Voici quelques réflexions d'un politologue russe qui rejoignent mon texte précédent sur la stratégie du morcellement appliquée au cas de la Russie.

MOSCOU, 12 septembre - RIA Novosti. La tolérance est une condition de la survie du pays, a annoncé, au cours du Deuxième forum médiatique du parti Russie unie, le politologue Viatcheslav Nikonov.

"Ceci revêt une importance particulière car la Russie est faiblement peuplée", a-t-il ajouté.

Le politologue estime que la détérioration des rapports interethniques est un phénomène naturel pour la période historique traversée actuellement par la Russie.

"A l'époque où s'écroulent les vieux idéaux, d'autres, plus simples, viennent les remplacer. Et l'idéal le plus simple est la division entre "nous" et les "autres", a noté le politologue.

A son avis, le problème de la Russie consiste en l'absence d'idée nationale dans le pays. "Le problème de la Russie consiste en l'absence d'idée nationale. Car aucun pays du monde ne saurait exister sans idée nationale", a-t-il ajouté.

Le politologue a expliqué la détérioration des rapports interethniques par la jeunesse du pays. "La Russie est un pays jeune, et le nationalisme est toujours très présent dans tous les pays jeunes".

"Mais l'absence de tolérance conduit à la désagrégation d'un Etat", a prévenu M. Nikonov.
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15 septembre 2006 5 15 /09 /septembre /2006 19:26
Cet article pourrait aussi s'intituler "Le pape, l'empereur chrétien et le djihad" ou encore "Rome et Constantinople contre Bagdad"...

Revenons d'abord sur quelques extraits d'un discours sur la Foi et la Raison prononcé par Benoît XVI devant l'université de Ratisbonne le 12 septembre dernier. Selon l'agence Associated Press, le Saint Père y a fait des références inhabituelles au djihad ou guerre sainte, un concept utilisé par les militants extrémistes islamistes pour justifier leurs attaques en Occident.

"La violence est incompatible avec la nature de Dieu et la nature de l'esprit", a déclaré le pape. Foi et Raison restent essentielles pour "ce dialogue sincère des cultures et des religions si urgent aujourd'hui".

Toujours selon AP, le pape a cité des passages d'un livre rendant compte d'une conversation entre un empereur byzantin du XIVe siècle, Manuel Paleologos II, et un "Perse" cultivé, sur les vérités du Christianisme et de l'Islam. "L'empereur est venu parler de la question de la guerre sainte", a déclaré le pape et citant un passage du livre "[Manuel II] a dit : montre-moi ce que Mahomet a apporté de nouveau, et tu ne trouveras que des choses diaboliques et inhumaines, comme son ordre de diffuser par l'épée la foi qu'il prêche". "L'empereur a continué en expliquant en détail les raisons pour lesquels diffuser la foi par la violence est quelque chose de déraisonnable", a poursuivi le souverain pontife.

Eh bien, il se trouve que le livre auquel se réfère le Saint Père... je l'avais acheté il y a un mois ! Quelle prescience !

Il s'agit des Entretiens de l'empereur Manuel Paléologue avec un musulman dont une partie a été publiée aux Editions du Cerf, cf. Manuel II Paléologue, Entretiens avec un musulman : 7e controverse, éd. par T. Khoury, Paris, 1966 (collection 'Sources chrétiennes', n° 115). L'ouvrage est encore disponible.

Manuel II Paléologue (1350-1425), un des derniers empereurs byzantins - et un de mes préférés, - était un homme intelligent et fort savant. Il vécut à une époque dramatique puisque l'empire grec était déjà à l'agonie du fait de l'invasion des Turcs (il y succombera en 1453). Ses entretiens avec un lettré musulman venu de Bagdad datent des mois qui précèdent son avènement au trône de Constantinople en 1391 alors qu'il hivernait avec ses troupes à Ancyre (aujourd'hui Ankara). Ils durèrent plusieurs jours en présence de nombreux auditeurs musulmans. La rédaction définitive eut lieu vers 1400 à Constantinople alors que la ville subissait un blocus des Turcs.

L'ouvrage est exemplaire des tentatives de dialogue religieux entre Christianisme et Islam, et de leur échec malgré l'ouverture d'esprit et la bonne volonté des deux interlocuteurs. Dans le cours de la controverse, Manuel II adresse deux reproches principaux à la loi de Mahomet, d'une part son retour pour l'essentiel aux prescriptions de la Loi juive, de l'autre le caractère déraisonnable de la loi du djihad ou guerre sainte.

Pour résumer (cf. le commentaire de Théodore Khoury, p. 107), le djihad est le moyen préconisé par le Coran pour assurer l'expansion de la religion d'Allah. Nul droit ne peut prévaloir contre le droit d'Allah à l'obéissance des hommes. Ceux qui se convertissent sont intégrés à la communauté et acquièrent les privilèges et les devoirs des croyants, y compris le devoir de guerre sainte. Ceux qui ne se convertissent pas, s'ils sont juifs, chrétiens ou zoroastriens, devront payer tribut et se contenter d'une condition inférieure (dhimmi), et s'ils ne le sont pas (payens ou athés), seront tués ou réduits en esclavage. Ainsi la loi du djihad doit-elle assurer la prédominance de la religion d'Allah.

C'est précisément cette loi de la guerre sainte qui est jugée déraisonnable par l'empereur Manuel, et même blasphématoire. La foi, argumente-t-il, est un fruit de l'âme. Seule la 'pensée juste' peut y amener et non point la contrainte et la violence corporelle. Une loi qui ferait des armes et de la guerre l'instrument de la propagation de la foi ne saurait être bonne. Elle est contraire à la sagesse divine.

D'autre part, la loi de Mahomet est un retour au Judaïsme (loi du talion, interdits alimentaires, polygamie, répudiation, circoncision). Elle ne retient en outre des lois juives que ce qui est facile, et en celà même, les défigure.

La 7e controverse examine plus particulièrement cette Loi de Mahomet qu'est l'Islam. Mais citons l'empereur :

"Dieu ne saurait se plaire dans le sang... [p. 145] La foi est un fruit de l'âme, non du corps. Celui donc qui entend amener quelqu'un à la foi a besoin de parole habile et d'une pensée juste, non de violence ni de menace, ni de quelque instrument blessant ou effrayant. Car de même que, quand il est besoin de contraindre une nature non raisonnable, on n'aurait pas recours à la persuasion, de même pour persuader une âme raisonnable, on ne saurait recourir à la force du bras, ni au fouet, ni à aucune autre menace de mort."
"Nul ne saurait prétendre que, s'il use de violence, c'est malgré lui et par un ordre de Dieu..."

"S'il se trouve que Mahomet ait ajouté quelque chose à la Loi de Moïse, aussitôt tu appelles cela Loi. Et tu ne te contentes pas qu'on te passe de parler ainsi, mais tu exiges qu'on préfère cette Loi à celles qui l'ont précédée. En vertu de quoi ?"
"Une des propriétés de la Loi, c'est d'établir des prescriptions nouvelles agréables à Dieu. La vôtre se vante de prescriptions empruntées. Si l'on élaguait les articles plus anciens, elle ne différerait en rien du geai de la fable (d'après Esope, cf. La Fontaine, 'Le geai paré des plumes du paon') : on lui prêta des plumes de toute sorte, puis on les lui ôta, et le voilà redevenu geai !"
"S'il en est ainsi, tout le monde jugera inférieure à celle des juifs votre Loi - appelons-la Loi, en attendant, pour te faire plaisir. Et si elle lui est inférieure, elle l'est bien plus à la Loi du Christ, laquelle, de votre aveu et de l'aveu de tous, l'emporte surabondamment sur celle des juifs."
"Je parlai ainsi. Il se fit un silence assez long..."
Le "Perse" répond [l'interlocuteur musulman n'est pas perse, mais le savant empereur emploie les noms antiques] (p. 149) : "J'ai dit, je dis et je dirai que belle et bonne est la Loi du Christ et bien meilleure que la Loi plus ancienne [juive], mais que supérieure aux deux est la mienne", etc.

Plus loin l'empereur reprend (p. 191) : "Comment est-il vrai, à ce que tu affirmes, que la Loi de Mahomet s'accorde avec la nôtre ? Qu'a-t-elle de commun avec elle ? ...Pour moi, c'est tout le contraire que je vois. Tu t'abuses : ta Loi s'oppose indubitablement à la nôtre et se rapproche de celle de Moïse."
(p. 197) "Les articles de l'ancienne Loi que le Sauveur a pour ainsi dire abrogés en les transformant de corporels qu'ils étaient en plus divins et spirituels, Mahomet, lui, les a retenus." [aliments impurs, en particulier la viande de porc, polygamie, loi du talion, etc.]

"Je crains d'avoir l'air de verser de l'eau dans un tonneau percé", dit encore l'empereur Manuel à propos du dialogue qui se poursuit...

Le plus intéressant dans cette affaire est sans doute l'ouverture du pape Benoît XVI, son attention, sa communion pourrait-on dire, et sa connaissance... des orthodoxes.

Pour l'intégral du discours du pape, voir :
www.vatican.va/holy_father/benedict_xvi/speeches/2006/september/documents/hf_ben-xvi_spe_20060912_university-regensburg_en.html
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31 août 2006 4 31 /08 /août /2006 00:16
Les commentateurs militaires divergent sur le bilan de l'intervention israélienne au Liban, selon qu'ils considèrent surtout la supériorité militaire flagrante d'Israël, ou bien la pugnacité de la résistance du Hezbollah. Mais à force de se focaliser sur la tactique militaire, leurs propos témoignent sans doute d'une certaine myopie. Il y a des exceptions. Pour sa hauteur de vues, j'ai donc choisi de reproduire ici l'entretien accordé au journaliste Viktor Litovkine, commentateur militaire de RIA Novosti, par le vieux général Makhmout A. Gareev. Gareev (82 ans, me semble-t-il) a fait toutes les guerres de l'armée soviétique depuis la Seconde Guerre Mondiale jusqu'à l'Afghanistan. Il est un théoricien militaire écouté et a publié plusieurs ouvrages dont M.V. Freunze, théoricien militaire, Moscou, 1985, et My Last War (Afghanistan Without the Soviet Armed Forces), Moscou, 1996.

Litovkine : Nous avions convenu avec le général d'armée Makhmout Gareev de nous rencontrer pour analyser la tactique et l'art opérationnel adoptés par les belligérants au cours du tout récent conflit israélo-libanais, mais dès le début de l'entretien le président de l'Académie russe des sciences militaires nous a demandé de commencer l'entretien par des appréciations politiques de cette guerre.

"La guerre ne saurait être séparée de la politique, a-t-il dit. Autrement ce ne serait pas sérieux. La tactique et l'art opérationnel sont des produits des missions politiques dont les militaires ont été investis".

La première appréciation du conflit israélo-libanais donnée par le général est liée aux véritables raisons, selon celui-ci, de cette guerre. "L'enlèvement à la frontière libanaise de deux soldats israéliens par le Hezbollah, n'était que le prétexte pour le début des hostilités, a dit le général Gareev. Tout le monde sait que le Mossad - les meilleurs services de renseignement au monde, c'est bien connu - a retrouvé et libéré des griffes de leurs ravisseurs des ressortissants israéliens jusqu'en Afrique. Par conséquent, il aurait très bien pu le faire sans problème au Liban. Le but réside donc ailleurs. Il fallait tout simplement une autre raison. Alors Tel-Aviv a manifestement agit de connivence avec Washington. Avec un désir évident, celui d'inciter la Syrie et l'Iran à entrer dans la guerre. En cas de réussite il aurait été possible aux Etats-Unis et à Israël de porter des frappes contre les "peu conciliants" Damas et Téhéran, contre les usines iraniennes d'enrichissement d'uranium. Et le fait que ce scénario ait fait long feu, est à porter à l'actif de ces pays et de la communauté internationale".

"C'est vrai que l'on peut aussi comprendre Israël, a dit le général. Avoir à sa porte une organisation aussi ingouvernable que le Hezbollah, qui a tout moment peut ouvrir le feu contre son territoire, tuer ses compatriotes, cela pose problème. Un problème qui préoccupe grandement Israël. Cependant, j'estime que la lutte contre le mouvement chiite aurait pu être menée autrement, au moyen de frappes ciblées, de la reconnaissance, de raids de commandos, mais personne ne parviendra jamais à justifier des bombardement massifs de la population, la mort de vieillards, de gens, d'innocents".

"D'un autre côté, si l'on s'en tient à la logique d'Israël et on approuve ses actions, sans pouvoir toutefois les justifier pleinement, alors après l'enlèvement de nos diplomates à Bagdad nous aurions dû nous mettre à bombarder l'Irak. En effet, il aurait été très simple de pilonner la capitale irakienne, les champs pétrolifères, les ponts... Zakaïev et d'autres terroristes tchétchènes se trouvent actuellement à Londres. Alors, faut-il entreprendre des raids sur le capitale britannique? Si une telle ligne triomphait, le monde serait mis en capilotade. Voilà pourquoi il faut toujours chercher les solutions les plus adéquates à la situation", estime le président de l'Académie des sciences militaires.

"Le monde arabe - près de cent millions de personnes - est très hétérogène. Les Etats islamiques n'ont pas constitué un front unique, pas même pour condamner Israël ou soutenir le Hezbollah, quoique, bien sûr, des manifestations contre la guerre au Liban aient eu lieu dans plusieurs pays. Toute personne normalement constituée s'insurge face à la mort de civils. Seulement l'absence d'un soutien unique du Liban montre qu'il n'y a pas de complot unique du monde islamique contre les chrétiens ou les Hébreux. Ce sont là des absurdités. Les Américains ont soutenu les musulmans albanais au Kosovo. L'Arabie saoudite a toujours été aux côtés des Etats-Unis. Elle a depuis longtemps pris le parti de l'Occident. Et pas seulement sur le plan idéologique: elle et les autres pays du Golfe sont liés aux finances occidentales. Les pétroliers arabes placent de l'argent dans toutes les banques du monde. Et ces dernières resteraient sans rien si elles se brouillaient avec eux".

"C'est peut-être la raison pour laquelle nous avons observé quelque chose de foncièrement nouveau au cours de la guerre israélo-libanaise, a dit le général Gareev. Jamais encore dans l'histoire de l'humanité l'armée d'un pays indépendant, reconnu par les Nations Unies, ayant des relations diplomatiques avec cent pays du monde, n'était restée les bras croisés lorsque son territoire et sa population avaient été attaqués. Cette armée, c'est celle du Liban. Qui plus est, elle n'avait même pas reçu l'ordre de défendre le territoire et la population libanaise. Stupéfiant. On se demande vraiment quelle peut être la raison d'être d'une telle armée? A quoi bon entretenir cette armée qui coûte pourtant cher aux contribuables libanais? C'est là un phénomène très dangereux et très préoccupant pour les autres Etats.

"Ce qui est grave aussi, c'est que le conflit israélo-libanais a révélé une tendance très désagréable, a ajouté le responsable militaire. Au cours de la première guerre mondiale, les civils avaient constitué 5% des pertes totales. La moitié pendant la Seconde Guerre mondiale. C'est vrai qu'en Union soviétique sur les 27 millions de tués plus de 18 millions n'avaient jamais tenu une arme à la main. Pendant la guerre du Vietnam les civils représentaient déjà 95% des pertes totales. Il se trouve des théoriciens pour faire l'apologie de la guerre dite "sans engagement", quand les belligérants échangent des frappes aériennes et navales sans entrer en contact direct. Mais contre qui ces frappes sont portées? Contre la population des villes, contre les sites industriels et énergétiques, les ponts, les routes, les écoles, les hôpitaux... Lorsque tout cela sera détruit, l'ennemi se rendra, estiment-ils. Prétendre cela a quelque chose d'inhumain. Mais même contre les gaz de combat et les armes toxiques des conventions internationales ont été adoptées, comme celles de La Haye, de Vienne... Il faut s'insurger contre ces modes de conduite de la guerre, il faut que l'ONU interdise de bombarder les villes, la population civile. Il faut aussi que ces procédés de conduite de la guerre soient qualifiés de crime contre l'humanité et au moins limiter l'usage des armes contre la population civile".

"Surtout qu'au Liban la destruction des ponts et des routes et l'assassinat de civils n'ont pas apporté la victoire à l'armée israélienne. Les milices soutenues par la population sont invincibles. Parce qu'elles ne circulent pas sur les routes et n'empruntent pas les ponts, ne se dissimulent pas dans les villes, suivent les sentiers de montagne et se reposent dans des cavernes et des bases connues d'elles seules. Voilà où réside leur force. Et le fait qu'avant le début des hostilités l'Armée israélienne n'avait pas localisé l'essentiel des positions du Hezbollah est à inscrire au passif de ses chefs".

"Je tiens aussi à relever que cette opération de Tsahal contre le Hezbollah et le Liban a été la plus malheureuse de son histoire, dit le président de l'Académie des sciences militaires. Pour tenter de se justifier Tel-Aviv prétend que le Hezbollah disposait d'"armes russes". Notamment des roquettes RPG-29 "Vampir". C'est effectivement une arme antichar efficace. Mais de nos jours on en trouve partout. Je ne m'explique pas comment la Russie aurait fourni ces roquettes. D'ailleurs, je ne crois pas à cette version. Ces dernières années l'Ukraine et même la Biélorussie en ont livrées secrètement. La Pologne, la Bulgarie, la Roumanie, la Hongrie commercialisent des armes de fabrication soviétique... Elles s'en débarrassent pour acquérir des armements otaniens. L'armée israélienne combat exclusivement avec des armes américaines et il ne viendrait à l'esprit de personne de demander des comptes à l'Amérique pour la présence d'armes made in USA en Israël. Les armes peuvent se retrouver n'importe où. Ici tout revient à la politique. Les milices du Hezbollah sont les maîtres au Liban. Ils se cachent, manoeuvrent, dressent des embuscades, possèdent un bon service de renseignement... Et, chose essentielle, ils bénéficient du soutien de la population, ce qui n'est pas rien".

"Je voudrais dire aussi que l'efficacité du système de reconnaissance et des armes de haute précision tant vantés n'est pas aussi grande qu'on le souhaite. On s'en est aperçu aussi en Irak en 2003. Les choses s'étaient avérées bien plus compliquées quand il avait fallu détruire des cibles non isolées . Et puis militairement parlant, les milices du Hezbollah se sont montrées à la hauteur. La valeur militaire avait toujours été un problème pour les armées arabes. Maintenant on sait que des forces au sein du monde arabe acquièrent puissance et expérience et que même les pays industrialisés et leurs armées vont devoir compter avec elles".

"Quant au problème du Proche-Orient, il faudra tôt ou tard le régler par la négociation, a dit en conclusion le général d'armée Gareev. Plus tôt nous le comprendrons et mieux ce sera. Pour Israël, pour ses voisins et même pour les forces qui se tiennent derrière eux".

RIA Novosti, 23/08/2006

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23 août 2006 3 23 /08 /août /2006 02:12

Le texte que vous attendiez tous !

L'hostilité assez largement répandue dans la presse française envers tout ce qu'entreprend le gouvernement russe, qui se double souvent d'une grande ignorance de la Russie, laisse passer bien des informations intéressantes dès lors qu'elles ne collent pas aux stéréotypes établis. Ainsi le 6 juillet dernier, le président Poutine avait annoncé que son pays redoublerait d'efforts dans la lutte contre le racisme et la xénophobie. Paroles destinées à apaiser les critiques de l'Union européenne, dira-t'on ? Non pas. Ce ne sont pas du tout paroles en l'air et la teneur exacte du propos le laisse bien entendre : "Ces manifestations (racistes et xénophobes) sont très dangereuses pour la Russie qui est un pays multiethnique et multiconfessionnel. Sans une riposte ferme, les fondements mêmes de l'Etat seront en péril".

La Russie en effet est un empire. Lorsque le président s'adresse à ses concitoyens, il ne dit pas "Chers Russes" mais "Chers Russiens" (daragié rossiani), ce que les journalistes d'Europe de l'Ouest ne traduisent pas mais qui signifie bien qu'il s'adresse à tous les habitants de l'Empire, qu'ils soient Russes à proprement parler (80 %), mais aussi Tatars, Ukrainiens (je parle des Ukrainiens de Russie), Bachkires, Ossètes, Tchouktches, Tchétchènes et bien d'autres. Tous ne sont pas russes mais tous cependant sont de culture et de langue russes. Dès lors la Russie doit se garder non seulement du danger du séparatisme, mais plus généralement de tout mouvement qui tendrait à la diviser en suscitant l'hostilité d'une de ses composantes contre les autres, sachant qu'environ 10 à 15% de sa population est de confession musulmane, ce qui explique aussi la réserve de Vladimir Poutine dans l'affaire des caricatures danoises.

Si les autorités russes perçoivent fort bien les risques que peuvent constituer les tensions ethniques ou religieuses, la même problématique peut être étendue à d'autres pays, France comprise. Comme dans le Caucase russe, les divisions ethnico-religieuses préexistantes ou nouvellement créées peuvent être instrumentalisées de l'extérieur, et là réside souvent le principal danger. Ce fut d'ailleurs longtemps la stratégie de la République française contre l'Empire austro-hongrois, stratégie d'ailleurs absurde et contre-productive in fine puisqu'en pulvérisant l'Autriche-Hongrie, elle aboutit au renforcement de l'Allemagne, à l'Anschluss et aux guerres de Yougoslavie. Nous n'y avons rien gagné. Mais la France elle-même pourrait bien être aujourd'hui victime de cette stratégie du morcellement dont elle s'était faite jadis la championne sous le nom de "droit des peuples à disposer d'eux-mêmes".

Il faut ici considérer deux aspects de la question : la composition ethnico-religieuse du pays d'une part, et les modifications qu'elle peut connaître du fait de la démographie et de l'immigration de l'autre. Le président russe cite d'ailleurs entre autres causes des tensions croissantes, le flux massif d'immigrés et l'inaction des autorités en place dont le devoir devrait être de protéger les intérêts des citoyens.

A défaut de divisions majeures, lorsqu'il s'agit d'une population homogène ou de populations diverses mais vivant en harmonie depuis longtemps, il est toujours possible d'en susciter artificiellement. Ainsi l'expansion de certaines sectes protestantes en Amérique latine n'est peut-être pas anodine. On peut d'ailleurs se demander s'il ne faut pas lire en ce sens, au-delà d'éventuels soupçons d'espionnage, la décision prise il y a quelques semaines par le président du Vénézuela Hugo Chavez d'expulser du pays tous les missionnaires anglo-saxons.  D'autres pays à forte unité nationale, comme le Brésil, où un métissage ancien a créé une forme d'homogénéité (elle-aussi aujourd'hui remise en question par des tentatives pour acclimater la discrimination positive à l'américaine), sont depuis peu le théâtre d'une diffusion extrêmement rapide des sectes protestantes et sont de ce fait en passe de perdre l'unité religieuse qui était la leur... Ailleurs, en Europe de l'Ouest en particulier, c'est l'introduction de l'Islam qui créé une nouvelle ligne de fracture.

Si les divisions anciennes peuvent parfois être réactivées, à plus forte raison les divisions récentes qui peuvent fragiliser un pays, voire le détruire. De ce fait, l'immigration, surtout lorsqu'elle concerne des populations trop diverses aux plans ethnique et religieux, n'est pas à considérer à la légère, d'autant que l'idéologie communautariste qui a cours aujourd'hui favorise le morcellement au détriment de l'unité nationale.

Le métissage a été abusivement proposé comme la solution-miracle, mais d'une part il est assez contradictoire avec le repli communautaire, d'autre part et c'est heureux il ne se décrète pas (!), enfin... il ne garantit en rien la paix civile. Dans le cas du Brésil par exemple, l'unité vient de plusieurs siècles  et il faut d'ailleurs noter que la composition de la population brésilienne n'a pas changé depuis plus de 50 ans. En France au contraire, la composition de la population s'est considérablement modifiée dans les trente dernières années et le phénomène s'accélère. Les Etats-Unis en revanche, berceau de la ségrégation et du communautarisme, paraissent mieux armés du fait d'une forte unité idéologique de la population autour du "modèle américain". De plus, le communautarisme est un élément constitutif de leur histoire. Ils savent en jouer et l'imposer à des pays auxquels ce concept était totalement étranger.

Les Etats comme les civilisations sont mortels. L'unité nationale peut se fissurer. Et certains déjà n'hésitent pas à faire jouer les lignes de fracture...

[Voir aussi sur ce thème un texte du 22 août 2006 "Entre le combat et la sécurité" sur le site de Ludovic Monnerat (www.ludovicmonnerat.com)].

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9 août 2006 3 09 /08 /août /2006 19:39

Le Vénézuela et Israël viennent de rompre leurs relations diplomatiques. Le 3 août dernier, le président vénézuelien Hugo Chavez a annoncé dans une allocution télévisée le rappel de son ambassadeur en Israël. A l'issue d'une parade militaire dans l'Etat de Falcon, dans le nord-ouest du Venezuela, il a précisé, en qualifiant de génocide les attaques israéliennes : "Cela provoque vraiment l'indignation de voir comment l'Etat d'Israël continue de bombarder, de tuer [...] avec toute la puissance qu'ils détiennent, avec le soutien des Etats-Unis".

Les relations entre les deux Etats sont à l'image de leurs relations respectives avec les USA. On se souvient de la campagne médiatique lancée par le Centre Simon Wiesenthal de Buenos Aires (Argentine) début janvier 2006, relayée par des journaux français (Le Monde et Libération du 9 janvier 2006), pour accuser Chavez d'antisémitisme. Le Centre prétendait même - sans grand effet d'ailleurs - bloquer l’intégration du Venezuela dans le Mercosur (marché commun latino-américain) en demandant aux gouvernements d’Argentine, du Brésil, du Paraguay et de l’Uruguay de geler le processus tant qu’Hugo Chavez n’aurait pas prononcé d’excuses publiques.

Il s'est avéré que ces accusations reposaient en fait sur une citation tronquée : "les descendants de ceux-là mêmes qui crucifièrent le Christ se sont appropriés les richesses du monde", qu'il faut replacer dans son contexte, une déclaration faite à la veille de Noël 2005 devant une association humanitaire : « El mundo tiene para todos, pues, pero resulta que unas minorías, los descendientes de los mismos que crucificaron a Cristo, los descendientes de los mismos que echaron a Bolívar de aquí y también lo crucificaron a su manera en Santa Marta, allá en Colombia. Una minoría se adueñó de las riquezas del mundo, una minoría se adueñó del oro del planeta, de la plata, de los minerales, de las aguas, de las tierras buenas, del petróleo, de las riquezas, pues, y han concentrado las riquezas en pocas manos : menos del diez por ciento de la población del mundo es dueña de más de la mitad de la riqueza de todo el mundo », Hugo Chavez Frias, 24 décembre 2005 (« Le monde appartient à tous, toutefois des minorités, les descendants de ceux-là mêmes qui crucifièrent le Christ, les descendants de ceux-là mêmes qui expulsèrent Bolivar d’ici et le crucifièrent d’une certaine manière à Santa-Marta, en Colombie ; une minorité s’est approprié les richesses du monde ; une minorité s’est approprié l’or de la planète, l’argent, les minéraux, l’eau, les bonnes terres, le pétrole, les richesses donc, et les a concentrées entre quelques mains : moins de 10 % de la population mondiale est propriétaire de plus de la moitié des richesses du monde »).

Il s'agit pourtant d'une dénonciation assez classique d'un certain impérialisme, doublée d'un constat que tout le monde peut faire (l'inégalité de la répartition des richesses entre les habitants de la planète), le tout mâtiné de lyrique bolivarienne avec une pincée de catholicisme ad hoc en cette veillée de Noël. Pas de quoi fouetter un chat. Les représentants de la communauté juive du Vénézuela s'étaient d'ailleurs totalement désolidarisés du Centre Wiesenthal.

Toujours est-il que les relations entre les deux pays sont, depuis, exécrables.

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6 août 2006 7 06 /08 /août /2006 01:10

Bientôt la suite du "Projet socialiste"... Quel suspens !

Enfin bon, je ne sais pas si vous aurez la suite parce que... qu'est-ce que ça me barbe ! Ces politiques là, vous ne pensez pas qu'ils pourraient écrire en français correct, non ? Toutes ces phrases creuses, ces formules artificielles, ces néologismes imbéciles, pouah ! Et allez repêcher une idée qui se tienne dans tout ça...

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5 août 2006 6 05 /08 /août /2006 23:59

Poursuivons l'analyse du "Projet socialiste", troisième partie, avec le chapitre VI ("L'immigration partagée") :

"L’immigration est un atout pour notre pays, à condition qu’elle soit maîtrisée, qu’elle s’accompagne d’une politique d’accueil et d’intégration efficace et qu’elle s’appuie sur un véritable partenariat avec les pays d’origine. Les socialistes combattent depuis toujours la méfiance de l’autre et encore pire, la haine de l’autre. Nous reviendrons sur les dispositions des lois Sarkozy qui ont précarisé la situation des immigrés installés depuis longtemps dans notre pays. Nous restaurerons la possibilité de régularisation après 10 ans de résidence. Nous respecterons le droit au regroupement familial pour protéger les enfants scolarisés, nés en France, ou y vivant depuis longtemps. Nous mènerons une politique de fermeté à l’égard de l’immigration illégale. Notre pays ne peut accueillir tous ceux qui le souhaitent. Il nous faut par conséquent dissuader l’immigration illégale et démanteler les filières mafieuses (augmentation des moyens de l’inspection du travail et aggravation des peines encourues pour les employeurs en infraction). Nous serons à l’initiative d’une politique européenne pour créer une police commune présente aux frontières extérieures de l’Union. Nous bâtirons un projet migratoire individuel pour une insertion réussie. Ce contrat permettra l’accompagnement personnalisé de l’étranger au moment de son arrivée sur le territoire français, avec la création d’un guichet unique d’accueil et d’insertion. Le régime des cartes de résidence assurera une plus grande stabilité du séjour aux étrangers. A cet effet, nous rationaliserons les administrations en charge de l’accueil des immigrés. Nous rendrons plus simple et plus solennelle l’accession à la nationalité française : une journée du citoyen rassemblera chaque année dans chaque mairie les Français lorsqu’ils atteignent l’âge de la majorité ou quand ils sont naturalisés. A cette occasion, les principes fondamentaux de la république seront rappelés. Nous veillerons au respect effectif du droit d’asile en assurant aux réfugiés statutaire un accompagnement individualisé pour améliorer leur situation. Nous accorderons une attention particulière à la place des femmes dans les processus d’insertion des migrants car elles jouent un rôle déterminant dans la transmission du langage, de la culture, et des valeurs et peuvent transmettre à leur famille les points de repères indispensables pour une intégration réussie. Nous construirons un partenariat avec les pays d’origine fondés sur le co-développement, l’immigration partagée, en multipliant les possibilités d’aller et retour, en favorisant l’investissement dans les pays d’origine mais aussi avec la signature d’accords de réadmission des immigrants illégaux dans les pays d’origine, des relations de coopération étroite doivent s’installer avec ces pays. Un grand plan européen à destination de l’Afrique devrait ainsi permettre de relancer le projet de Banque Euro-Méditerranée."

Peu de nouveauté dans ce programme en fait.

1) Le postulat de "l'immigration, atout pour notre pays" et les bons sentiments faussent la perception de la réalité d'une pression migratoire qui va croissante et des problèmes très graves qui en découlent (traite humaine et trafics en tous genres, délinquance et criminalité, justice engorgée et prisons saturées, déficit de la Sécurité sociale, révision des salaires à la baisse, déracinement culturel des immigrés comme des autochtones, sans parler de la substitution de population). La différence artificielle entre immigration légale, qui serait bonne, et immigration illégale, mauvaise et à laquelle on prétend appliquer une "politique de fermeté", est dépourvue de sens à partir du moment où l'illégal devient légal au bout de 10 ans d'illégalité.

2) Le budget de l'Inspection du travail est tellement dérisoire qu'on pourra toujours l'augmenter, le doubler même, cela n'empêchera en rien les filières d'immigration de continuer leurs transferts lucratifs. En revanche, des mesures plus dissuasives contre les employeurs de clandestins pourraient effectivement se révéler efficaces, encore ne touchent-elles que l'immigration de travail.

3) Au-delà des mots ronflants, le "projet migratoire individuel pour une insertion réussie" et autres "journée du citoyen" semblent bien dérisoires, et la police européenne aux frontières laisse assez dubitatif.

4) Le respect du droit d'asile est une chose, mais aucune allusion n'est faite ici au détournement de ce droit par les filières migratoires.

5) L'attention particulière que le PS entend accorder aux femmes immigrées dans les "processus d'insertion" risque cependant d'achopper sur le statut extrêmement dévalorisé de la femme parmi beaucoup de ces populations immigrées.

6) Des partenariats existent déjà avec la plupart des pays d'origine de l'émigration africaine et maghrébine, sans compter les vieilles relations du type Françafrique... Il faudrait certes une coopération plus étroite avec des pays comme l'Ukraine ou la Moldavie, mais de ceux-là il ne semble pas être question dans le programme socialiste. Par contre, je n'ai pas compris ce qu'il faut entendre par "immigration partagée"... Est-ce que quelqu'un comprend ??? Enfin la banque euro-méditerranée existe déjà, à ce qu'il me semble : elle s'appelle Norwich Union.

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